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En Algérie, qui pour remplacer Abdelaziz Bouteflika ?

Après plus d’un mois de contestation massive et inédite à travers ce pays d’Afrique du Nord, M. Bouteflika a finalement démissionné le 2 avril sous la pression conjuguée de la rue et de l’armée qui a menacé de ne plus reconnaître son autorité.

Agé de 82 ans, affaibli par un accident vasculaire cérébral depuis 2013, M. Bouteflika était chef de l’Etat depuis 20 ans, mais son souhait de briguer un cinquième mandat à la présidentielle prévue en avril a provoqué de gigantesques manifestations.

Une semaine après sa démission, les parlementaires de l’Assemblée populaire nationale (APN, chambre basse) et du Conseil de la Nation (chambre haute) sont convoqués ensemble mardi vers 08H00 GMT pour acter la « vacance » à la tête de l’Etat.

Ils doivent ensuite charger, conformément à la Constitution, le président de la chambre haute, poste occupé actuellement par M. Bensalah, d’assurer l’intérim à la tête de l’Etat pendant 90 jours.

Mais vendredi, les Algériens ont à nouveau défilé en masse pour exiger que soient exclus du processus de transition les hommes-clés de l’appareil mis en place par M. Bouteflika.

Un trio a été particulièrement visé: M. Bensalah, le président du Conseil constitutionnel Tayeb Belaïz et le Premier ministre Noureddine Bedoui.

« Choix cornélien »

Le Mouvement de la société pour la paix (MSP, 34 députés sur 462), principal parti islamiste et longtemps soutien du camp Bouteflika avant de rompre en 2012, a indiqué qu’il boycotterait mardi la session parlementaire, refusant de « valider la désignation d’Abdelkader Bensalah comme chef de l’Etat par intérim » car « contraire aux revendications du peuple ».

L’appel des manifestants semble avoir été entendu, puisque mardi, l’éditorial du quotidien gouvernemental El Moudjahid, traditionnel vecteur de messages du pouvoir, a suggéré d’écarter M. Bensalah de la présidence par intérim.

« Cette personnalité (…) n’est pas tolérée seulement par le mouvement citoyen, qui exige son départ immédiat, mais aussi par l’opposition et une partie des représentants des formations politiques de la majorité des deux Chambres du Parlement », indique El Moudjahid.

Le journal se demande encore comment va réagir M. Bensalah à la fronde. Va-t-il « prendre acte des fortes oppositions qui se manifestent, démissionner et laisser la place à une autre personnalité moins contestée, pour mener la courte période de transition » ou va-t-il « se maintenir, au nom du respect de la même Constitution ? ».

« Un choix cornélien dont on espère que la raison et les intérêts suprêmes du pays l’emportent sur les considérations personnelles », poursuit le quotidien.

Problème: le chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, de facto le nouvel homme fort du pays, exige que la succession de M. Bouteflika se fasse dans le strict cadre de la Constitution.

Celle-ci prévoit que le président du Conseil de la Nation transmette le pouvoir avant l’expiration du délai de 90 jours à un nouveau chef de l’Etat élu lors d’une présidentielle.

Le mouvement de contestation réclame lui de sortir de ce cadre pour mettre sur pied des institutions de transition permettant d’engager des réformes profondes et d’organiser des élections libres.

Vers une « rupture » ?

En cas de retrait, de plus en plus probable, de M. Bensalah, ce serait son successeur à la tête du Conseil de la Nation qui prendrait l’intérim.

Mais « lui ou toute autre personne issue du Conseil de la Nation sera rejetée par la rue », avance Rachid Grim, enseignant en Sciences politiques à l’Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP) d’Alger, interrogé par l’AFP.

Si la présidence de la chambre haute était laissée vacante, la Constitution charge alors de l’intérim le président du Conseil constitutionnel, M. Belaiz, autre personnalité honnie par les manifestants.

« C’est là où il y a un vrai problème. L’armée tient à ce que cela (la transition) se fasse à l’intérieur de la Constitution et la rue veut que cela se fasse à l’extérieur de la Constitution. Si l’armée n’assouplit pas sa position, on va vers la rupture », s’inquiète M. Grim.

Al Moudjahid a évoqué une piste de compromis avec la création d' »une commission indépendante » qui serait chargée de tout le processus électoral.

Dans la rue mardi matin, des Algériens affichaient leur refus de M. Bensalah.

« Il doit démissionner, c’est la voix du peuple et le peuple doit avoir raison », déclarée à l’AFP Mourad, 50 ans, un entrepreneur qui va manifester le vendredi avec ses deux filles, âgées de six et neuf ans.

« Elles ne savent pas ce que c’est la démocratie (…) je veux leur inculquer ce qu’est la liberté », ajoute-t-il.

« On est en train de renaitre », lance de son côté Sofiane, 45 ans. « Bensalah n’a pas d’autre choix que la démission ».

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