Ceux qui, aujourd’hui, demandent aux musulmans de se désolidariser de l’Etat islamique sont ceux qui, finalement, jouent le jeu des terroristes.
Ça y est, après ce week-end de deuil, ils sont ressortis. Avec sur leurs profils Twitter et Facebook – souvent – leur « noun », le symbole des chrétiens d’Orient persécutés et avec – toujours – leur croisade contre l’Islam. Les obsédés du #NotInMyName demandent une nouvelle fois, après les attentats de Paris qui se sont déroulés dans la nuit de vendredi à samedi, aux musulmans de se désolidariser. Cela voudrait donc dire qu’ils sont, à leur façon, responsables à défaut d’être coupables. « Pour moi, la laïcité c’est la liberté pour tous les Français de pratiquer la religion de leur choix, y compris les musulmans », a notamment dit Alain Juppé. Ajoutant : « A une condition: c’est que les Français musulmans disent clairement qu’ils n’ont rien avoir avec ce fanatisme, cette barbarie. »
Vous avez dit présomption d’innocence ?
Alain Juppé pose donc les conditions. Ses conditions ! De cette phrase, on comprend que les Français musulmans ont le droit de vivre libres et dans un pays laïque, à la seule condition donc de dire qu’ils n’ont rien à voir avec une attaque dont ils ont été aux aussi les victimes. Un procès étrange et très arbitraire. On sait bien qu’Alain Juppé n’est pas juriste. Mais en tant qu’ancien mis en examen – dans une affaire d’« abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux, et prise illégale d’intérêt » puis dans l’affaire des emplois fictifs de la Mairie de Paris –, l’ex-Premier ministre doit connaître le sens de l’expression « présomption d’innocence. » Même s’il a écopé, à l’époque, de deux ans de prison avec sursis et qu’il a donc été plus souvent coupable qu’innocent.
Alain Juppé n’est bien évidemment pas le seul à culpabiliser les musulmans de France. Mais il en est aujourd’hui le symbole, lui qui avait un discours plus modéré que ses collègues des Républicains auparavant. Or, en demandant à toute la communauté musulmane de France de se désolidariser et donc en l’accusant à demi-mots d’être coupable des attentats – ou responsable tout du moins –, on bafoue de nombreux textes. A commencer par l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui mentionne la présomption d’innocence. L’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’Homme également, tout comme l’article préliminaire du Code pénal.
Et si on leur demandait de descendre dans la rue ?
Aujourd’hui, tous ces hommes et femmes politiques, ces obsédés du #NotInMyName, ces journalistes à la Ivan Rioufol devraient se rendre compte qu’en appelant les musulmans à descendre dans la rue, ils stigmatisent une partie de la population et qu’ils font le jeu de Daesh, sans sourciller. Confortant ainsi l’Etat islamique dans ces atrocités. Et si, finalement, c’était à tous ceux-là de descendre dans la rue pour prouver qu’ils sont solidaires avec TOUS les Français de TOUTES les religions, « y compris les musulmans », comme le dit si bien Alain Juppé ?