C’est une banale histoire de reportage à charge comme les JT les aiment. Nous sommes en décembre 2016 et France 2 diffuse un reportage intitulé « Quand les femmes deviennent indésirables dans les lieux publics. » « Dans certains quartiers populaires, les hommes occupent les lieux publics et les femmes subissent », décrit la journaliste, prenant l’exemple d’un café de Sevran dans lequel Nadia Remadna et Aziza Sayah ont filmé en caméra cachée. Un café dans lequel « il n’y a pas de mixité », affirme un témoin. Problème : Nadia Remadna et Aziza Sayah sont des militantes très engagées et surtout très controversées. La première, notamment, a créé la Brigade des Mères et n’hésite pas à diffuser un discours alarmiste et souvent faux sur les banlieues. Elle avait par exemple assuré que le CCIF appelait les populations des quartiers à ne pas voter. Le reportage de France 2 a été largement diffusé : près de 115 000 partages directs et une résonance nationale : même les candidats à la présidentielle ont été sommés d’évoquer le sujet, ce qui avait d’ailleurs valu à Benoît Hamon une polémique disproportionnée.
La contre-enquête passée sous-silence
D’autant plus disproportionnée que, vendredi, Le Bondy Blog a décidé de diffuser une contre-enquête détonnante. Dans le même café — en réalité un bar PMU —, la journaliste est allée à la rencontre du patron et des quelques clientes, plus nombreuses dans la réalité que dans la caméra cachée de France 2. Le gérant du bar raconte notamment les retombées de ce reportage pour son business — le chiffre d’affaires a baissé de près de 15 % —, mais également pour ses filles qui ont été insultées et menacées. Un reportage passionnant qui démonte, un à un, les affirmations de la journaliste de France Télévisions. Problème : le mal est déjà fait. L’exemple des « cafés interdits aux femmes » est régulièrement cité dans les médias. Les journalistes qui ont partagé, en masse, cette caméra cachée ne seront que trop peu à aujourd’hui partager la contre-enquête, au nom d’un corporatisme qui n’a aucunement lieu d’être. Même Nadia Remadna admet que l’histoire du café de Sevran a été exagérée. Et c’est bien là le problème : si l’enquête à fait le buzz, la vérité, elle, ne sera que partiellement rétablie.
© Photo : Le Bondy Blog