vendredi 22 novembre 2024
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Hier, Emmanuel Macron a parlé au CFCM, pas aux musulmans de France

A l’approche de l’arrivée à la présidence du Conseil français du culte musulman du Turc Ahmet Ogras, Emmanuel Macron s’est rendu à un iftar avec les membres du CFCM. Il l’avait promis il y a quelques jours, il l’a donc fait. A la tribune, le nouveau président de la République s’est fendu d’un discours parfois condescendant, toujours paternaliste — n’est pas le CRIF qui veut. Il a forcément été, lors de ce discours, question de terrorisme et de réforme de l’Islam en France. Mais ce qui a surtout marqué dans les déclarations d’Emmanuel Macron, c’est sa faculté à démontrer la non-représentativité du CFCM. Le président français a en effet pointé du doigt le manque de légitimité de l’institution imaginée par Nicolas Sarkozy, rappelant notamment que « les élections pour le CFCM et les CRCM (les antennes régionales du CFCM, ndlr) ont trop souvent été marquées par des refus de participation qui n’ont pas été, le plus souvent, bien compris parmi les musulmans eux-mêmes. » Et il a raison : en 2008, la Grande mosquée de Paris (GMP) annonçait son intention de boycotter les élections du CFCM ; en 2011, c’était au tour de l’UOIF de bouder le scrutin de renouvellement des représentants au conseil. Tous les deux ans, le cirque électoral reprend de plus belle. Montrant ainsi le peu de légitimité dont bénéficie le CFCM. Les musulmans de France, eux, regardent ça de loin non sans un certain je-m’en-foutisme.

Une représentativité au mètre carré

Car les élections des représentants du conseil sont en effet loin de représenter tous les musulmans du pays. Emmanuel Macron a d’ailleurs, hier, regretté que « le nombre de mosquées qui participent aux élections reste aujourd’hui encore trop faible. » Certes, le CFCM compte parmi ses représentants des membres de l’ex-UOIF et de la Fédération nationale de la Grande mosquée de Paris. Sauf que tout ce beau monde a de nombreux points de désaccord et qu’on ne comprend pas trop ce qui peut les réunir au sein d’une même institution. Ainsi, la Grande mosquée de Paris tente de faire cavalier seul — elle a refusé de participer au dialogue des instances de l’Islam avec le gouvernement — et de sortir du lot quand l’UOIF, elle, tente de se refaire un beauté de façade et de s’éloigner de son image de succursale des Frères musulmans. Plusieurs voix, donc, au sein d’un même conseil. Et un mode de nomination des délégués élus aux Conseils régionaux du culte musulman peu démocratique : le nombre de délégués se calcule en effet en fonction de… la surface des lieux de culte — 100 mètres carrés donnent droit à un délégué, 800 mètres carrés à quinze délégués —. Une méthode de marchands de tapis qui montre bien le peu de représentativité du Conseil : car non, l’Islam ne se négocie pas en termes de surface foncière. Mais c’est pourtant comme ça que cela se passe au CFCM. Même Dalil Boubakeur l’avait regretté il y a près de dix ans, en estimant que ce mode de scrutin profitait à « des lieux de culte récemment édifiés, en périphérie urbaine voire dans les campagnes, qui ont des surfaces importantes ». Des critères, ajoutait le recteur de la GMP, qui favorisait ainsi « l’émergence d’une représentativité qui ne reflète en rien la sociologie de l’Islam ». Comprenez : un système dans lequel la Grande mosquée de Paris n’a pas l’influence qu’elle espère. On en est donc là : tenter de savoir qui sera le mieux représenté au sein d’une institution qui manque de représentativité. Une guerre des chefs, en quelque sorte, qui montre à quel point cette antenne du ministère de l’Intérieur pédale dans le vide. Et Emmanuel Macron semble s’en être rendu compte depuis bien longtemps déjà.

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