A la suite de Jean-Pierre Chevènement, conseillant aux Musulmans d’être plus « discrets », Manuel Valls a enjoint la communauté musulmane à la réserve dans un entretien publié par la Provence le 17 août dernier. Une saillie du Premier ministre que les principaux concernés jugent exaspérante.
Interrogé par les journalistes de La Provence sur la vague d’interdiction des burkinis décidée par des maires de communes côtières françaises, Manuel Valls a indiqué « comprendre les maires qui, dans un climat de tension, ont le réflexe de chercher des solutions qui permettent d’éviter des troubles de l’ordre public ». Le Premier ministre précise même qu’il les « soutient », si toutefois ils sont « mus par le désir d’encourager le vivre-ensemble, sans motivations politiciennes ». Valls insiste : pour lui, le burkini est la traduction d’un » assujettissement de la femme » et cet habit « n’est pas compatible avec les valeurs de la France et de la République ». Il conclut, sans détour, que la « République doit se défendre ».
Jusqu’à présent, sept mairies ont pris des mesures anti-burkinis ou ont annoncé leur intention de l’appliquer. Hormis Cannes, Villeneuve-Loubet et Mandelieu-La Napoule sur la Côte d’Azur, ou Leucate, près de la frontière espagnole, la ville corse de Sisco, Le Touquet et Oye-Plage, sur la Manche, ont emboîté le pas à Mandelieu-la-Napoule, première commune, en juillet 2013, à amorcer le mouvement.
L’exaspération monte chez les Musulmans
Et une manière, plus générale, préconisée par Valls pour « défendre la République » serait que les Musulmans se fassent plus discrets dans leur vie quotidienne. Un « conseil » que le chef du gouvernement reprend à Jean-Pierre Chevènement, héraut notoire des valeurs républicaines et tout récemment propulsé à la tête de la Fondation des oeuvres de l’islam de France. L’ancien ministre avait défrayé les critiques suite à sa recommandation aux Musulmans de France de « rester discrets ». L’assentissement de Manuel Valls n’est pas loin d’être la dernière goutte d’eau qui fera déborder le vase de patience des Musulmans, lassés d’être une cible malléable à merci.
Interrogés par RMC, des fidèles de la Grande mosquée de Créteil dissimulent mal leur exaspération. « C’est fatigant. Ses propos sont déplacés », commente Christophe, converti à l’Islam il y a cinq ans. « Il nous demande d’être discret quand il le veut et il nous demande de réagir quand il se passe des choses et qu’il en a besoin. Ce n’est pas à un politique de donner des ordres à une communauté religieuse ! », s’exclame-t-il, outré. Un autre fidèle, Tutti, est las d’être constamment désigné du doigt : « On le sait qu’on est stigmatisé. On vit avec. On ne va pas se sentir comme des victimes, mais ça arrive souvent malheureusement ». Le vice-président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), Ahmet Ogra, traduit le message du Premier ministre en ces termes : « Ca veut dire « partez d’ici, on n’a pas besoin de vous ». On en a marre du matin au soir de parler de l’islam avec un certain esprit colonialiste, ça commence à énerver tout le monde ! »
Le parti d’en rire
Malgré cette lassitude générale, certains ont pris le parti d’en rire. Et les réseaux sociaux fourmillent de perles sur l’injonction faite aux Musulmans de rester discrets. Un hashtag a même été créé sur Twitter : #MusulmanDiscret.
– Pourquoi vous absenter 5 fois par jour ?
– Pour manger mes fruits et légumes tranquillement. #MusulmanDiscret— SaloméRainbow (@Salomerainbow) 15 août 2016
Ne dites + »je vais au »haj »ms je participe au rayonnement français en Arabie avc de potentiels marchés à la clé. #MusulmanDiscret #MuslimFute
— Nassira El Moaddem (@NassiraELM) 15 août 2016