« La mère du peuple » n’a pas encore les deux pieds hors du palais présidentiel. Mais elle a fait un grand pas vers la sortie en attendant le vote du Sénat. Les députés brésiliens ont voté pour la destitution de la présidente Dilma Rousseff.
Celle qui a succédé à Lula au palais présidentiel ne digère pas ce qui s’annonce comme une défaite. Pour Dilma Rousseff, la présidente brésilienne, la destitution qui pointe le bout de son nez sonne comme une injustice : « S’opposer à moi, me critiquer, fait partie de la démocratie. Mais démettre une présidente élue de façon légitime, sans que celle-ci ait commis un quelconque crime (…) n’est pas le jeu démocratique. C’est un coup d’Etat », résume la chef d’Etat brésilienne. Car la « mère du peuple », comme elle a longtemps été surnommée par Lula, n’a pas grand-chose à se reprocher : Dilma Rousseff n’est au cœur d’aucune affaire de corruption, même si elle est accusée par l’opposition d’avoir maquillé des comptes publics en 2014, année de sa réélection. Son seul tort est d’avoir offert à Lula, son prédécesseur, l’immunité en tentant de le nommer au gouvernement, alors qu’il est accusé de corruption dans le scandale Petrobras.
Au Sénat désormais de statuer
C’est finalement pour une politique économique très critiquée que Dilma Rousseff va devoir très prochainement quitter son poste au profit de son concurrent et vice-président, Michel Temer, qui devrait assumer ses fonctions et former un gouvernement de transition en attendant de prochaines élections. C’est ce dernier qui a précipité la chute de la présidente, en quittant la coalition au pouvoir. Depuis plusieurs mois, la popularité de Dilma Rousseff ne cesse de s’effondrer : elle tourne autour de 10 % d’opinions favorables et plus de six Brésiliens sur dix souhaitent son départ. Cela pourrait bien se concrétiser, si le Sénat, majoritairement opposé à la présidente, venait à le décider.
« Une bataille s’est déclenchée entre un gouvernement incompétent, soutenu par un parti qui a trahi ses idéaux (le Parti des Travailleurs), et une opposition hypocrite, dirigée par un législateur accusé de corruption, Eduardo Cunha », résume l’analyste politique Sylvio Costa. Nous avions pu le voir avant la Coupe du monde au Brésil : la population ne voit pas le bout du tunnel et les manifestations se multiplient pour demander une vie meilleure. Ce serait une première au Brésil qu’un chef de l’Etat soit destitué simplement pour avoir politiquement échoué. L’opposition du Congrès à la moindre des réformes proposées par Dilma Rousseff aura pesé lourd dans la balance. De plus la présidente avait connu une période de doutes qui en témoigne également : elle avait hésité à demander à Maria das Graças Foster de quitter son poste à Petrobras, malgré les soupçons qui planaient sur elle. Le Brésil, qui vit une crise économique grave, va également devoir faire face à une crise politique importante.