Une centaine de personnes sont venues écouter Elsa Lefort à Montreuil, qui parlait de l’incarcération arbitraire de son mari Salah Hamouri. Elle était accompagnée d’Halima Boumediène, ex-sénatrice EELV et avocate, Youcef Brakni, professeur et militant, et Yasser Kaous, ancien compagnon de cellule de Salah.
Salah Hamouri aura déjà passé sept années en prison. Il fut, par quatre fois, incarcéré par l’Etat israëlien, et cela sans aucun motif. Elsa Lefort, interdite de territoire depuis, explique qu’Israël est le seul pays « dit démocratique » qui retient prisonnier sur son territoire des personnes sur de simples présomptions. Pour cela, il suffit au gouvernement de décréter que cette personne est potentiellement dangereuse à l’équilibre du pays afin qu’il soit arrêté et placé en détention administrative.
Yasser Kaous, Afro-Palestinien, a déjà été emprisonné en Israël et connaît bien la justice du pays ainsi que ses conditions d’incarcération. Il explique que la durée d’une incarcération administrative n’est pas à prendre en compte (en l’occurrence 6 mois pour Salah), car il peut y avoir tacite reconduction de la détention, et cela sans aucun jugement. En 2005 Salah Hamouri avait déjà été retenu de cette manière pendant plus de trois ans avant d’être condamné à sept ans de prison par un tribunal militaire.
« Elsa Lefort attend plus de soutien de la part d’Emmanuel Macron »
Elsa Lefort attend logiquement plus de soutien de la part d’Emmanuel Macron, mais également de tous les élus. Quelques villes telles qu’Ivry-sur-Seine ou Bagnolet ont déjà voté un vœu demandant la libération de Salah Hamouri. Mais d’autres municipalités ont refusé, et notamment les villes socialistes de Paris et d’Evry pour des raisons fallacieuses. Bien qu’il vive à Jérusalem-Est, où il s’est fait arrêter par l’armée le 23 août dernier, Elsa rappelle que son mari est un citoyen français à part entière. Il est certes né de père palestinien et de mère française mais il n’a pas la double nationalité. « Le Président de la République doit agir », clame-t-elle. « Nous ne demandons pas de passe-droit. Nous demandons le même engagement du gouvernement français pour la libération de Loup Bureau incarcéré en Turquie. Mon mari n’est pas emprisonné en Turquie, il est en Israël, il n’est pas journaliste, il est avocat. Mais il est tout aussi français. »
Halima Boumediène, avocate de longue date, s’émeut du manque de mobilisation de la profession. Encore une fois, par parallélisme « les journalistes sont très solidaires entre eux et l’ont encore prouvé avec l’incarcération de Loup Bureau », dit-elle. Les avocats sont également très solidaires entre eux, c’est pourquoi elle a écrit au président du Syndicat des Avocats de France (SAF) afin qu’il se saisisse de l’affaire. Cependant, la réaction de Bertrand Couderc fut beaucoup plus timorée qu’espéré. La gêne venant de la récente obtention du barreau par Salah Hamouri et du contexte politique complexe. Ce n’est qu’après moult tractations que celui-ci a accepté d’écrire une lettre au président de la République basant son argumentaire sur la nationalité française de Salah, marié à une française avec des enfants. Le courrier ne condamnera aucunement l’état du jugement administratif, pourtant arbitraire et injustifié.
« Les politiciens français ont plutôt tendance à fermer les yeux sur les exactions commises par Israël par logique économique »
Youcef Brakni nous rappelle que ce n’est pas la première fois qu’on se montre frileux sur la situation israëlo-palestinienne. L’interdiction du boycott que menait l’association BDS montre que les politiciens français ont plutôt tendance à fermer les yeux sur les exactions commises par Israël par logique économique. Selon Youcef Brakni, la condition de la Palestine et celle des quartiers ont toujours été intimement liées et c’est peut-être ça qui a incité certains partis politiques à s’y intéresser. Le combat des Palestiniens a incité beaucoup de militants à s’engager politiquement en luttant contre les injustices, à l’image de son combat pour que justice soit faite à Adama Traoré. La deuxième Intifada a énormément marqué les quartiers, et ce n’est pas un hasard si les émeutes de 2005 ont eu lieu peu de temps après.
Elsa Lefort devrait être reçue par un conseiller diplomatique le 9 octobre prochain, non pas pour « visiter l’Elysée » comme elle le dit, mais pour que le gouvernement français soutienne un de ses citoyens détenu à l’étranger de manière arbitraire. Et cela, comme il a toujours su le faire par le passé pour n’importe quel autre citoyen français emprisonné à travers le monde. Mais chacun peut, à son niveau, soutenir Salah Hamouri, au moins moralement, en lui écrivant un message de soutien à l’adresse suivante : Al-Naqab prison, mail box : 13, section 24 – Postal code : 84102 Israël.