« Madame Merkel, pourquoi cachez-vous des terroristes dans votre pays ? Pourquoi ne faites-vous rien ? » C’est de but en blanc que le président Erdogan a interpellé hier soir, au cours d’une interview télévisée sur la chaîne turque A-Haber, la chancelière allemande. Objet du courroux présidentiel : l’absence de réaction de Berlin à l’envoi par Ankara de quelque 4500 rapports sur de présumés terroristes. Ce qui a amené Erdogan, en direct à la télévision, à tirer comme conclusion : « Madame Merkel, vous soutenez les terroristes ». Du côté allemand, on préfère jouer l’accalmie – ou l’autruche, selon les points de vue. « Ces reproches sont évidemment aberrants (…) », a réagi le porte-parole de la Chancellerie, Steffen Seibert, par un bref communiqué écrit. « La chancelière n’a pas l’intention de participer à un concours de provocations. » Erdogan est particulièrement remonté contre l’Allemagne, qu’il dénonce d’abriter des activistes kurdes et des suspects du putsch avorté du 15 juillet 2016, qualifiant même cet appui « d’implacable ».
Escalade sur fond de référendum
Cette ultime saillie du président Erdogan, dont l’inflexibilité est devenue manifeste depuis la tentative de coup d’Etat à son encontre l’été dernier, reflète l’aggravation des relations entre la Turquie – naguère partenaire privilégié sur la question des migrants – et des pays de l’Union européenne. Erdogan ne pardonne notamment pas à son homologue allemande d’avoir officiellement apporté son appui au Premier ministre hollandais Mark Rutte, dans la crise diplomatique qui a éclaté ces derniers jours. Les Pays-Bas avaient en effet refusé à des ministres turcs l’accès à des meetings organisés sur son territoire en faveur du référendum organisé le 16 avril prochain et destiné à transférer davantage de pouvoirs au président turc. C’est également dans cette optique que les autorités allemandes avaient interdit plusieurs rassemblements, aggravant la colère d’Ankara. Et sa stratégie jusqu’au-boutiste. Erdogan n’avait pas hésité à comparer le gouvernement allemand au « Troisième Reich » et à « une nouvelle tendance du nazisme ».