La crise du Golfe s’étend désormais à la religion, avec l’ouverture du pèlerinage. Alors que les Saoudiens avaient indiqué aux pèlerins du Qatar qu’ils pourraient participer au Hajj 2017 sans difficulté, de nombreux obstacles semblent se dresser devant les ressortissants du petit émirat qui souhaitent accomplir l’un des piliers de la religion musulmane. Une situation dénoncée par le ministère qatarien des Affaires islamiques, qui a indiqué hier dans un communiqué que RIyad « a refusé de communiquer au sujet de la garantie de la sécurité des pèlerins et de l’assistance pour leur Hajj ». Dans ce communiqué, Doha « exprime ses regrets de voir la politique mêlée à l’un des piliers de l’Islam, ce qui pourrait empêcher de nombreux musulmans d’accomplir ce devoir sacré ». Environ 20 000 ressortissants du Qatar doivent normalement effectuer le Hajj cette année. Le Qatar qui dénonce « des obstacles (…) en raison de la crise créée par les pays auteurs du blocus ».
L’Arabie saoudite accusée de politiser le Hajj
L’agacement du Qatar dans ce dossier a été relayé par les médias saoudiens, qui accusent l’émirat de vouloir « internationaliser » les lieux saints musulmans. Une exigence qui irait dans le sens de la position iranienne. L’Etat perse appelle en effet, depuis plusieurs décennies, à internationaliser les deux mosquées saintes pour que le Hajj puisse être organisé sans aucune ingérence étrangère. « La demande du Qatar d’internationaliser les lieux saints est un acte d’agression et une déclaration de guerre contre le royaume », a répondu Ali Jubeïr, ministre saoudien des Affaires étrangères. De son côté, son homologue qatarien rappelle qu’« aucun responsable n’a fait de déclarations concernant une internationalisation du Hajj » et qu’« aucune démarche n’a été faite pour discuter du Hajj à un niveau international ». Le Qatar reproche à l’Arabie saoudite de « politiser » le pèlerinage.
Vers un statut de Corpus Separatum pour La Mecque ?
Si cet appel à l’internationalisation des lieux saints a été « fabriquée » et « inventée » par les médias saoudiens, comme l’indique Doha, la question du statut de La Mecque et de Médine pose pourtant question. Car l’Arabie saoudite fait un business juteux du Hajj, qui lui rapporterait près de 50 milliards de dollars par an. Or, selon les textes coraniques, nul n’a le droit de venir en ces lieux sans être en état de sacralisation et les commerçants dont le seul but est de se livrer à son commerce à la Mecque, et ne venant donc pas ni pour le Hajj, ni pour la Omra, sont formellement interdits. Il a souvent été avancé la possibilité d’offrir aux lieux saints de l’Arabie saoudite un statut de Corpus Separatum, une enclave séparée sous juridiction internationale. Avec la crise du Golfe, cette idée pourrait bien faire à nouveau son bonhomme de chemin. Car les bâtons mis dans les roues des Qatariens qui veulent se rendre à La Mecque ne passent décidément pas…