En Suisse comme ailleurs, le halal est au cœur des débats. Pourtant, le pays a interdit l’abattage rituel. Mais il est toujours possible, pour les commerçants, d’importer de la viande halal, notamment en la commandant aux industriels français. Problème : si la viande française est bien vendue comme halal ou casher aux entreprises suisses, ces dernières ne sont, jusqu’à aujourd’hui, pas obligées d’indiquer qu’elle est issue de l’abattage rituel à leurs clients. Un manque de transparence qui déplait, puisque les Suisses ne veulent pas forcément se retrouver avec de la viande halal ou casher dans leur assiette sans avoir été mis au courant préalablement. Un parlementaire suisse, Yannick Buttet, a lancé une initiative, votée en mai dernier par la Chambre du peuple, qui stipule qu’il faudra désormais une « déclaration obligatoire à toutes les étapes de la vente, y compris dans le commerce de détail et dans les restaurants, afin d’accroître la transparence ». Jusque là, rien d’anormal.
Les communautés musulmane et juive stigmatisées
Mais c’est un autre volet de l’initiative parlementaire qui fait polémique. Car la viande halal provenant de France coûte moins cher que la viande non halal, la faute à un allègement des droits de douane. Le Parlement suisse a donc décidé de « revoir les coûts d’adjudication pour ne pas pénaliser les autres entreprises importatrices de viande », indique la Tribune de Genève. Les membres de la Chambre du peuple ont décidé, en clair, d’augmenter les prix de la viande halal. La gauche crie au scandale, notamment parce que cette mesure pourrait stigmatiser toute une communauté. Le Conseil d’Etat a, de toute façon, recalé une première fois cette initiative. Il devra se pencher à nouveau dessus très prochainement. Mais les risques qu’elle passe existent encore. Quoi qu’il en soit, cette initiative semble contrevenir à la Constitution fédérale dont l’article 15 garantit, en Suisse, la liberté de conscience et de croyance. Or, après l’interdiction de l’abattage rituel, augmenter les prix du halal reviendrait à tenter de dissuader les musulmans de manger halal. Pour ce faire, les députés se cachent derrière leur volonté de protéger les animaux. Mais la suppression du droit de douane allégé permettrait surtout, petit à petit, de mettre un terme à la consommation de viande issue de l’abattage rituel en Suisse. Au grand dam des musulmans et juifs helvétiques.