jeudi 31 octobre 2024
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Les jihadistes sont-ils les fruits de la laïcité à la française ?

Pourquoi la France et la Belgique sont-elles de contingents de jihadistes, loin devant le Royaume-Uni ? Selon des chercheurs américains, la conception de la laïcité défendue par l’Etat serait la cause principale.

C’est une étude américaine qui pose une véritable question : la conception française de la laïcité nourrit-elle l’extrémisme et le terrorisme ? Les chercheurs sont partis d’un constat irréfutable : la France et la Belgique ont les plus forts ratios de combattants jihadistes, rapporté au nombre d’habitants. « Aussi bizarre que cela puisse paraître, quatre des cinq pays enregistrant les plus forts taux de radicalisation dans le monde sont francophones, dont les deux premiers en Europe », ajoutent même les scientifiques américains. Ils ont donc tenté de trouver la raison d’un tel écart entre la France et le Royaume-Uni par exemple, où l’on compte tout de même 2,4 millions de musulmans.

Les musulmans réclament le droit à l’indifférence

« L’approche française de la laïcité est plus agressive que celle, entre autres, du Royaume-Uni. La France et la Belgique, par exemple, sont les deux seuls pays à interdire le port du voile intégral dans leurs écoles publiques », résument les chercheurs américains. Existe-t-il pour autant un lien de cause à effet ? En tout cas, « par habitant musulman, la Belgique produit nettement plus de combattants étrangers que le Royaume-Uni ou l’Arabie saoudite », font-ils remarquer. Si les chercheurs de la Brookings Institution pointent également le chômage et le taux d’urbanisation comme sources de radicalisation sunnite, lorsqu’ils sont combinés, ils n’hésitent pas à dénoncer « l’approche  française draconienne de la laïcité. »

Et ce ne sont pas les seuls à faire ce constat. Pour l’historien John Tolan, en France, « quand les musulmans français réclament le droit de porter le foulard, d’avoir des repas sans porc dans les cantines scolaires, ou de s’absenter du travail ou de l’école pour célébrer des fêtes, leurs demandes sont souvent vues comme l’expression d’un communautarisme. » Pour lui, il s’agit pourtant pour les Français musulmans de « demander une égalité de traitement ou (…) un droit à l’indifférence : le droit, par exemple, de ne pas être fixé et ostracisé à cause de ses vêtements, de sa barbe, de sa coupe de cheveux ou de son régime alimentaire. »

De la neutralité à la stigmatisation

Rappelant que « six des dix jours fériés français sont catholiques, quand des musulmans — ou des juifs, ou des bouddhistes — demandent à pouvoir célébrer leurs propres fêtes », l’historien explique notamment que les musulmans de France « demandent simplement un traitement égalitaire de la part d’un gouvernement supposément laïque et neutre. » Or, conclut-il, « plutôt que de reconnaître les insuffisances de la laïcité française ou au moins d’accueillir favorablement un débat sur la question de savoir si le système actuel reflète bien les principes de neutralité et de séparation qu’il est censé incarner, beaucoup d’hommes politiques français et d’écrivains préfèrent stigmatiser les musulmans, les blâmant pour les contradictions inhérentes à l’athéisme libéral. » La naissance du Printemps républicain ou la résurgence d’un laïcisme loin des valeurs de la loi de 1905 en sont l’exemple.

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