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Législatives en Autriche : la droite et l’extrême-droite au pouvoir ?

Six millions d’électeurs autrichiens étaient appelés aux urnes dimanche 15 octobre, pour des élections anticipées renouvelant leur Parlement. Avec 31,7 % des voix, le parti chrétien-démocrate ÖVP de Sebastian Kurz, 31 ans, remporte le scrutin. Il devance le parti d’extrême-droite FPÖ (26 %) et les sociaux-démocrates (26,9 %). Ainsi, à 31 ans, l’actuel ministre des Affaires étrangères devrait devenir le chancelier de l’Autriche et le plus jeune dirigeant européen. 

Désormais, une alliance avec l’extrême-droite est devenue le scénario le plus probable, car avec 31,7 %, le parti de Sebastian Kurz ne peut gouverner seul. Le chancelier sortant a même déclaré il y a quelques jours : « Les points communs dans les programmes de l’ÖVP et du FPÖ sont considérables. » 

«Protection de la patrie et de la culture dominante. » Pour le FPÖ, l’Islam n’a pas sa place en Autriche

En effet, durant la campagne, les deux partis (qui ont déjà formé une coalition entre 2000 et 2007) ont fait de l’immigration et de l’Islam leur vitrine. Le FPÖ, dont le candidat sortant avait failli gagner la présidence en décembre dernier, a proclamé que « l’Islam n’a pas sa place en Autriche » et a réclamé la création d’un ministère « pour la protection de la patrie et de la culture dominante. » En plein coeur de la capitale, durant la campagne, on pouvait aussi y lire sur ses affiches : « l’islamisation doit être stoppée. »

Une « islamisation » qui passe entre autres, selon le parti, par l’immigration. Ainsi, l’extrême-droite refuse catégoriquement l’arrivée de nouveaux migrants, dont l’accueil a déjà été plafonné à 37 500 en 2016.

Sebastian Kurz, du parti ÖVP prône lui aussi la fermeture des frontières. Il a également proposé de réduire les allocations aux étrangers. Il a enfin appuyé l’interdiction du financement étranger des mosquées et la récente interdiction du port du voile intégral dans l’espace public. Une mesure qui n’arrive pas au hasard, puisqu’elle est entrée en vigueur en Autriche quelques semaines seulement avant l’élection.

Alors que l’Autriche compte environ 600 000 musulmans, pour un pays de 8,7 millions d’habitants, le rejet de l’islam grandit dans la population. Selon une récente étude européenne, un tiers des Autrichiens n’aimeraient pas avoir un musulman comme voisin. L’ambiance est donc tendue et la politique du nouveau chancelier inquiète les associations musulmanes, comme le NMZ : Netzwerk Muslimische Zivilgesellschaft (Réseau de la société civile musulmane).


Trois questions à Fatma Firat, porte-parole du NMZ

LeMuslimPost : Quelles ont été les réactions des musulmans suite à la victoire du parti de Sebastian Kurz ?

Fatma Firat : Même si ces résultats étaient attendus en raison de récents sondages, cela a tout de même été un choc. On espérait encore que les Autrichiens se rendent compte que cette campagne électorale s’était déroulée sur le dos des minorités. 

Par exemple, pendant la période pré-électorale, Sebastian Kurz a commandé une étude sur les jardins d’enfants musulmans et il a décidé qu’ils devaient être fermés (ndlr selon ses déclarations ils pousseraient à créer des « sociétés parallèles »). Plus tard, il a été découvert que les fonctionnaires du bureau Kurz avaient manipulé les résultats de l’étude afin de rendre la situation des écoles maternelles musulmanes plus mauvaise qu’elle ne l’était dans les premiers résultats. 

Actuellement, l’Université de Vienne vérifie la validité scientifique de l’étude, car cela veut dire que tout le monde peut être ciblé en tant qu’individu ou organisation dans la communauté musulmane.

Redoutez-vous des mesures antimusulmans de plus en plus importantes avec l’arrivée de la droite et de l’extrême-droite au pouvoir ?

Nous craignons en effet de plus en plus de restrictions. Il est certain que le nouveau gouvernement Kurz poursuivra une politique hostile aux musulmans encore plus forte. 

« Un notable de l’extrême droite et vice-recteur de l’Université de Vienne comme caution scientifique »

Le problème est que nos partis présentent leurs propres ‘experts’ en matière d’immigration et d’islam.. Ils les disent indépendants et académiques mais dans les faits ils le sont beaucoup moins. Par exemple, Heinz Fassmann, expert en intégration et en affaires étrangères de Sebastian Kurz, a beaucoup insisté sur la mise en œuvre du principe de neutralité afin d’interdire les «symboles» religieux. Heinz Fassmann est aussi le vice-recteur de l’Université de Vienne. C’est une personnalité controversée qui a été inscrite au comité d’honneur de l’extrême-droite en 2013. Heinz Fassmann fait également partie des experts d’ÖIF (Fond Autrichien d’intégration).

« Une plateforme contre l’extrémisme religieux pour attaquer la Turquie et le Qatar mais ‘surtout pas’ l’Arabie Saoudite »

C’est cette même institution qui a commandé des études sur les écoles maternelles et maintenant une nouvelle étude sur les mosquées. Sebastian Kurz a également nommé l’ex-politicien vert Efgani Dönmez comme ministre de l’intégration. Dönmez a récemment lancé une plate-forme contre l’extrémisme avec l’imam Seyran Ates. Après quelques recherches, un journal autrichien a découvert que leur plate-forme avait été établie pour attaquer des pays comme le Qatar et la Turquie, tandis que l’Arabie saoudite était strictement interdite d’être attaquée. Cela suggère que Dönmez fait du lobbying pour l’Arabie Saoudite. 

Comment expliquez-vous le succès de ces partis populistes en Autriche ? 

Les problèmes sociaux croissants et la situation économique actuelle peuvent expliquer le succès de ces partis auprès de nombreux Autrichiens. Alors que le pouvoir d’achat diminue depuis les années 90, les salaires autrichiens n’ont pas vraiment augmenté. Je pense que cela rend les Autrichiens plus vulnérables à des discours anti-immigration. Plusieurs études ont été publiées pendant la période électorale et évoquaient une menace potentielle de la part des organisations musulmanes. L’image de « l’ennemi musulman » est maintenant largement répandue. Malheureusement, nous pouvons observer aussi ce virage vers la droite dans d’autres pays d’Europe centrale.

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