Quelques heures après l’attaque vendredi de deux mosquées à Christchurch par un suprémaciste blanc, qui a coûté la vie à 50 fidèles musulmans, Jacinda Ardern se trouvait dans cette localité de l’île du Sud, coiffée d’un voile, en témoignage de sa solidarité avec les familles des victimes.
Le lendemain, à Wellington, la dirigeante travailliste de 38 ans avait à nouveau la tête recouverte d’un voile, prenant dans ses bras des membres de la communauté musulmane sous le choc.
Ce témoignage de solidarité et de douleur partagée parle à de nombreux Néo-Zélandais qui se sentent aujourd’hui vulnérables, et représente un rejet des idées de haine véhiculées par le tueur.
« Elle n’a jamais eu à faire face à quelque chose d’aussi horrible », relève Vicki Spencer, du département des sciences politiques de l’Université d’Otago. « Ni aucun autre Premier ministre de Nouvelle-Zélande ».
« L’empathie a toujours été l’une de ses forces, et jamais on ne s’en est autant aperçu », dit David Farrar, auteur du populaire blog politique Kiwiblog.
« La photo d’elle à Christchurch portant un foulard sur la tête, l’air bouleversé, est une image puissante, qui a force d’icône. Je crois que Mme Ardern a été quasiment parfaite dans sa réaction à la tragédie ».
Jacinda Andern a dépassé ce rôle de consolatrice en chef pour affronter les défis posés par l’extrémiste australien qui, à l’insu des agences de renseignement, a pu venir dans son pays, acheter légalement des armes de guerre et commettre ce carnage.
Immédiatement après le massacre, la cheffe du gouvernement s’est donc attelée à ces problèmes, annonçant un changement de la législation sur les armes.
« Je sais qu’il y a actuellement de la douleur en Nouvelle-Zélande mais il y a aussi de la colère, il y a des questions auxquelles il faut répondre », a-t-elle dit lors de l’une de ses nombreuses interviews télévisées, d’un ton calme et rassurant.
La Première ministre de Nouvelle-Zélande a de nouveau adressé mardi un message de paix appuyé aux musulmans et promis de ne jamais prononcer le nom du tueur des mosquées pour l’empêcher d’acquérir la notoriété à laquelle il aspirait.
« Par cet acte terroriste, il recherchait beaucoup de choses, mais l’une d’elles était la notoriété », a dit Mme Ardern aux parlementaires rassemblés à Wellington, la capitale.
« C’est pourquoi vous ne m’entendrez jamais prononcer son nom. C’est un terroriste. C’est un criminel. C’est un extrémiste. Mais quand je parlerai, il sera sans nom ».
« Je vous implore: prononcez les noms de ceux qui ne sont plus plutôt que celui de l’homme qui les a emportés ».
Ce discours empreint d’émotion était porteur d’un message particulier à l’adresse de la communauté musulmane. Vêtue de noir, l’air solennel, la cheffe du gouvernement âgée de 38 ans a ouvert la séance par l’expression « salam aleykum ».
« Vendredi, une semaine se sera écoulée depuis l’attaque. Les membres de la communauté musulmane se rassembleront pour la prière ce jour là. Reconnaissons alors leur douleur », a-t-elle ajouté.
Devant le Parlement réuni en session spéciale, Jacinda Ardern a également déclaré que le suprémaciste blanc auteur du carnage de Christchurch, dans l’île du Sud, tomberait sous le coup de la loi la plus stricte.
L’extrémiste Brenton Tarrant, 28 ans, a été inculpé pour l’heure d’un chef de meurtre mais la justice n’en restera pas là. « Il fera face à la loi dans toute sa rigueur », a lancé Mme Ardern.
Elle a enfin répété qu’une enquête serait ouverte afin de déterminer comment l’Australien avait pu planifier et mener ses attaques en Nouvelle-Zélande au nez et à la barbe des services de sécurité.