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Présidentielle aux Comores : des tensions avant un « hold-up électoral » ?

Tout au long d’une campagne qu’il a écrasée des moyens de l’Etat, M. Azali, 60 ans, a répété qu’il comptait bien l’emporter dès le premier tour sur ses douze rivaux, nourrissant de forts soupçons de fraude.

Dès l’ouverture vers 08h00 heure locale des 731 bureaux de vote de cet archipel de l’océan Indien, l’opposition a fait état de graves irrégularités dans les îles d’Anjouan, en majorité hostile au président, et de Mohéli.

Un responsable de la Commission électorale (Ceni) a confirmé à l’AFP qu’une dizaine de bureaux de vote anjouanais avaient été saccagés.

Selon des témoignages recueillis sur place par l’AFP, ces échauffourées sont liées à la découverte d’urnes remplies et à l’interdiction faite à des assesseurs issus de partis de l’opposition d’exercer leurs fonctions.

« Dans la mesure où mes délégués ont été empêchés d’entrer dans les bureaux de vote (…) je ne reconnaîtrai jamais les résultats », a déclaré à la presse le candidat du parti Juwa, Mahamoudou Ahamada, après avoir voté dans l’île de la Grande Comore. « C’est une mascarade qui est en train de se jouer à Anjouan ».

« C’est un véritable coup d’Etat », a lancé un autre candidat, Ibrahim Mzimba, lui aussi avocat.

« Situation maîtrisée »

Interrogé par la presse alors qu’il venait de déposer son bulletin dans l’urne dans une école de son fief de Mitsoudje, dans le centre de l’île de la Grande Comore, Azali Assoumani a confirmé quelques incidents.

« On m’a dit qu’il y avait eu des problèmes là-bas. Ce n’est pas une surprise (…) on a constaté pendant la campagne qu’il y avait des gens qui n’étaient pas là pour gagner mais pour que le scrutin n’ait pas lieu », a-t-il ajouté, « la situation est maîtrisée ».

Tout sourire, le chef de l’Etat sortant s’est déclaré « confiant, plus que confiant même » dans sa capacité à rafler la mise dès dimanche soir.

A la tête du pays de 1999 à 2006, réélu en 2016, l’ancien colonel putschiste a engagé sa grande entreprise de maintien au pouvoir en faisant adopter il y a un an une réforme constitutionnelle par référendum.

Ce texte a étendu de un à deux mandats de cinq ans la durée de la présidence attribuée par rotation à un natif de chacune des trois îles de l’archipel (Grande-Comore, Mohéli, Anjouan). Dans la foulée, le chef de l’Etat a remis en jeu son mandat et convoqué les électeurs pour la présidentielle anticipée de dimanche.

Par la grâce du nouveau calendrier électoral, Azali Assoumani pourrait rester, en cas de victoire, au pouvoir jusqu’en 2029.

L’opposition a crié au scandale. Ce système, dit-elle, a remis en cause le fragile équilibre institutionnel instauré en 2001 pour mettre fin aux crises séparatistes et aux coups d’Etat à répétition qui agitaient l’archipel depuis son indépendance en 1975.

Dérive autoritaire

Mais rien n’y a fait. Au contraire, le président a fait taire les critiques à grands coups d’arrestations. Son prédécesseur et ennemi juré Ahmed Abdallah Sambi est détenu pour corruption et plusieurs dirigeants de partis condamnés pour tentatives de coup d’Etat.

Incapable de s’unir, prise de cours par l’accélération du calendrier électoral, décimée par la répression, l’opposition a abordé le scrutin très affaiblie.

Elle a dénoncé la dérive autoritaire du régime, sa corruption et son incapacité à réduire la pauvreté extrême des 800.000 habitants d’un pays dont le quart du PIB est issu des transferts de fonds de la diaspora comorienne, surtout établie en France.

« Nous avons besoin d’un changement réel dans ce pays, pas de belles paroles. Il nous faut la paix, la sécurité, l’émergence », a déclaré à l’AFP Mohamed Chaïne, 38 ans, qui a voté dans la capitale Moroni.

Nombre d’observateurs redoutent des troubles en cas de fraude. Notamment dans l’île d’Anjouan, furieuse que la réforme constitutionnelle ait repoussé son tour d’élire un président de son cru de 2021 à 2029.

Le ministre de l’Intérieur Mohamed Daoudou a promis la « transparence totale » du scrutin.

Mais à sa veille, il a empêché le déploiement, financé par l’Union européenne (UE), de plus de 800 observateurs de la société civile comorienne au motif que certains d’entre eux seraient « partisans ».

« Le hold-up électoral est en marche », a averti, fataliste, Salim Soulaïmane, le coordinateur de la Plateforme citoyenne qui devait superviser les élections.

Les bureaux de vote doivent fermer à 18H00, heure locale, pour des résultats attendus lundi.

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