Le succès de la « modest fashion » n’est plus à prouver. Sur les réseaux sociaux, les « hijabistas » (jeunes fashionistas portant le voile) sont depuis plusieurs années devenues elle aussi des influenceuses de mode. Et ce aussi au bien au Moyen-Orient, qu’en Europe ou aux Etats-Unis.
Même les grands créateurs comme Givenchy ou Yves Saint Laurent s’y sont mis, en revisitant le hijab ou l’abaya, tout comme les marques de prêt-à-porter telles H&M, Uniqlo, Marks & Spencer, proposant des collections ciblant une clientèle musulmane.
C’est cette mode en pleine croissance et qui gagne en visibilité, qu’à voulu mettre en avant le musée Young de San Francisco. Du 22 septembre au 19 janvier, ce dernier accueille les créations de jeunes designers musulmanes originaires d’Indonésie, de Dubai, des Etats-Unis ou encore du Royaume-Uni.
L’idée ? Montrer la diversité des interprétations des textes sacrés de l’Islam à travers le temps, les cultures et ses influences sur la mode.
Ainsi, les vêtements exposés vont de la haute-couture extravagante de Christian Dior et Jean-Paul Gautier, en passant par des créations fantaisies évoquant l’histoire de l’orientalisme dans le design musulman, ou encore des collections de vêtements de ville, mais aussi des habillements sportifs comme le burkini. Hijab, burqa, turban, headwrap, on y trouvera aussi toute la diversité des couvre-chefs.
« Il y a eu une explosion de créativité dans le secteur musulman de la ‘modest fashion’ au cours de la dernière décennie. Ma collègue Jill D’Alessandro, conservatrice chargée des arts du costume et des arts textiles, et moi-même avons pensé qu’il serait intéressant d’explorer cette évolution », explique sur internet Laura Camerlengo, commissaire de l’exposition.
La Contemporary Muslim Fashion mettra également en avant le travail de Céline Semaan Vernon, de la marque de mode activiste américaine Slow Factory.
Ses foulards en soie avec l’imprimé « Banned » en référence au Muslim Ban de Donald Trump, seront exposés, mis en vente, et les fonds reversés à l’ACLU (L’Union américaine pour les libertés civiles).
Le combat de la blogueuse mode et activiste d’origine iranienne, Hoda Katebi, contre les stéréotypes sur les femmes musulmanes voilées, sera aussi évoqué.
« Pour de nombreuses stylistes musulmanes, la mode sert non seulement de support pour partager leur style personnel, mais aussi pour exprimer leurs préoccupations religieuses contemporaines et pour dénoncer les injustices sociales », souligne la commissaire.
Des récits, photographies, coupures de presse, vidéos et séquences de défilés accompagnent d’ailleurs l’exposition. Ils expliquent les contextes culturels et sociaux dans lesquels ces vêtements sont portés.
« Dans la culture populaire américaine en particulier, il y a ce récit habituel selon lequel les femmes musulmanes, pudiques, portent des vêtements très larges et sombres. Lorsque les gens entreront dans la galerie et qu’il verront cette créativité, à quel point nombre de ces femmes sont à la mode … je pense que certains de nos visiteurs seront surpris », a déjà annoncé Laura Camerlengo.
Après la clôture de l’exposition, la Contemporary Muslim Fashions se rendra au musée Angewandte Kunst de Francfort, en Allemagne, où elle sera présentée au printemps 2019.