Les manifestations continuent et s’intensifient au Soudan, ayant déjà provoqué la mort d’une vingtaine de personnes. Depuis trois semaines, le pays est en crise, suite à la décision du gouvernement de multiplier par trois le prix du pain.
L’annonce de trop, alors que plusieurs villes dont Khartoum, la capitale, souffrent déjà de l’augmentation du prix de la nourriture et des médicaments. Des pénuries d’aliments et de carburant ont également été signalées dans plusieurs villes du pays.
Depuis 2011 et l’indépendance du Soudan du Sud, le pays connaît une grave crise économique, avec une inflation de près de 70% par an. Le Soudan du Sud a également été amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole.
Les manifestations actuelles sont donc un mouvement de contestation inédit, les plus importantes en près de 30 ans de pouvoir pour le président Béchir, selon les experts.
Et alors que les manifestants protestaient dans un premier temps contre le prix du pain, ils s’en prennent désormais au gouvernement au pouvoir, porté responsable des mauvais résultats économiques.
Mais si Omar el-Béchir est fortement contesté dans son pays, ses alliés du Moyen-Orient continuent de le soutenir.
« Toutes les parties dans la région (Moyen-Orient) sont à couteaux tirés mais s’accordent d’une certaine façon sur Béchir. Elles pensent que toute alternative pourrait ne pas leur être favorable », explique à l’AFP Abdelwahab al-Affendi, universitaire au Doha Institute for Graduate Studies.
« L’Arabie saoudite et les Emirats ont décidé de soutenir le Soudan en lui fournissant gratuitement des dérivés pétroliers »
Selon le blogueur saoudien Mujtahid, suivi par plus de deux millions d’abonnés, « l’Arabie saoudite et les Emirats ont décidé de soutenir le Soudan en lui fournissant gratuitement des dérivés pétroliers pour un an, pour le mettre à l’abri d’une révolution », rapporte France Info.
Une aide passant par un prêt à faible taux d’intérêt, selon les informations de Mujtahid, qui écrit sur Twitter que celle-ci devrait couvrir les besoins du Soudan pendant un an. « La plus grande partie de cette aide sera aspirée par le réseau de corruption à l’œuvre dans le pays », prévient-il.
Ce soutien financier serait selon le blogueur, une façon de récompenser le président soudanais pour son voyage en Syrie et sa rencontre avec le président Bachar al-Assad en décembre 2018.
En 2016, Omar el-Béchir a également rejoint l’alliance saoudienne contre les rebelles Houthis au Yémen. Des centaines de soldats soudanais combattent ainsi dans les rangs de la coalition et l’Arabie saoudite entend bien les conserver.
« En échange, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis ont donné à Béchir juste assez pour rester à flot », commente Abdelwahab al-Affendi, qui évoque lui aussi une aide financière versée à Khartoum.
L’Egypte et le Qatar, d’autres soutiens de poids pour le président soudanais
Quelques jours après le début des manifestations au Soudan du Sud, l’émir du Qatar cheikh Tamim ben Hamad al-Thani aurait aussi appelé le président soudanais pour lui offrir son aide, selon les informations de l’AFP.
« L’Egypte soutient totalement la sécurité et la stabilité du Soudan, qui sont fondamentales pour sa sécurité nationale », a à son tour déclaré le président Abdel Fattah al-Sissi à un proche conseiller du président soudanais reçu au Caire, la semaine dernière.
Selon l’analyse de Abdelwahab al-Affendi, l’Egypte, le Qatar et l’Arabie saoudite « sont contre toute sorte d’insurrection réussie au Soudan. Ils estiment que si cela arrive, ils seront les prochains sur la liste », avec en mémoire le Printemps arabe en 2011.