C’est dimanche soir qu’Abou Al Kheir Al Masri, dit simplement « Al Masri », a été tué par un missile lancé par un drone américain sur la voiture dans laquelle il se trouvait, alors qu’il se déplaçait dans la province d’Idleb, à une soixantaine de kilomètres au sud-ouest d’Alep. L’information a été communiquée aux médias locaux par le front Fatah Al Cham, naguère connu sous le nom « front Al Nusra » – l’ancienne filiale de l’organisation terroriste à laquelle appartenait Al Masri. Impliqué depuis trois décennies dans le djihadisme, le gendre d’Oussama Ben Laden, âgé de 59 ans, est considéré comme l’un des membres du cercle rapproché du leader d’Al Qaïda, Ayman Al Zawahiri, lui aussi Egyptien.
Selon Hicham El Hachimi, un expert du djihadisme terroriste basé à Bagdad, la mort d’Al Masri « n’est pas moins importante que celle de Ben Laden ». Il était le « leader idéologique [d’Al Qaïda] en Irak, en Syrie et au Yémen et le numéro deux de l’organisation », précise-t-il. Membre du Conseil central de la Choura, l’organe exécutif d’Al Qaïda, une réponse sera « nécessairement apportée » par le groupe terroriste, « de Syrie ou d’ailleurs », estime un autre analyste et enseignant américain au Middle-East Institute, Charles Lister. Sans surprise, Al Masri était dans le viseur des autorités américaines depuis de nombreuses années.
Une mort « non moins importante que celle de Ben Laden »
En 2005, il était désigné par les Etats-Unis comme le « responsable de la coordination d’Al Qaïda avec d’autres organisations terroristes », qui soulignent sa participation aux attentats contre les ambassades américaines de Kenya et de Tanzanie en 1998, qui avaient fait plus de 200 morts, en majorité civiles. La présence d’Al Masri a été enregistrée en Egypte, en Bosnie, en Afghanistan et au Pakistan. C’est son domicile de Kaboul qui a justement été utilisé par Khalid Sheikh Mohamed, le chef du commando responsable des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, d’où ce dernier préparait et informait les leaders d’Al Qaïda sur les préparatifs des attaques.
Al Masri a en outre combattu aux côtés de Ben Laden en Afghanistan, et été emprisonné plus de dix ans en Iran. Libéré en 2015 en échange d’un diplomate iranien séquestré par Al Qaïda au Yemen, il s’est alors rendu en Syrie. Dans une vidéo datant de juillet 2016, il annonçait que le front Al Nusra se détachait d’Al Qaïda pour devenir le front « Fatah Al Cham ». « Il était l’intermédiaire clé entre le groupe terroriste et ses filiales avec d’autres entités djihadistes de par le monde », souligne Lister. « Son mariage avec l’une des filles de Ben Laden l’a propulsé au coeur des rouages d’Al Qaïda dès sa création ».