« Je pense qu’aujourd’hui, les conditions ne sont pas réunies pour que Karim Benzema revienne en équipe de France. Il est toujours mis en examen. » La phrase est signée Manuel Valls. Elle était intervenue alors que Karim Benzema était empêtré dans l’affaire Valbuena et mis en examen pour complicité de tentative de chantage et participation à une association de malfaiteurs. Le Premier ministre français avait alors rappelé qu’« un grand sportif doit être exemplaire. S’il ne l’est pas, il n’a pas sa place en équipe de France. » Alors que le joueur du Real Madrid a toujours déclaré être « innocent » et n’avoir « rien commis de répréhensible », il a dû se battre contre une opinion publique largement réfractaire à l’idée de le voir porter le maillot bleu. Didier Deschamps avait alors « cédé sous la pression d’une partie raciste » de la France, avait assuré Benzema, devant qui les portes des Bleus s’étaient fermées aussitôt.
L’Euro non, l’Elysée oui ?
Un peu plus de six mois plus tard, la situation semble s’être déplacée du monde du football à la politique. Pris dans une affaire d’emplois fictifs, François Fillon a prévenu, la semaine dernière, qu’il serait « convoqué le 15 mars afin d’être mis en examen. » Mais lui ira jusqu’au bout, assure-t-il. On peut donc aujourd’hui, si l’on est mis en examen, avoir sa place dans la course à la présidentielle mais pas en équipe de France de football. Comme si un footballeur avait une obligation de moralité vis-à-vis des Français alors qu’un politique non. Sauf qu’être mis un examen n’a jamais empêché un footballeur de marquer des buts, là où un dirigeant politique est censé jouer « un rôle éminent en matière de justice », comme le résume le site de la Direction de l’information légale et administrative.
La France c’est le pays où quand t’es mis en examen tu ne peux pas jouer l’Euro de foot mais tu peux devenir président ^^ #Fillon
— Labidi Yosri (@yosri06) 1 mars 2017
Fillon et Benzema ont quand même un point commun…
Or, François Fillon est dans une situation bien pire que celle dans laquelle est plongé Karim Benzema. Alors, pourquoi le député aurait-il le droit, alors qu’il est mis en examen, de prendre le départ de la course à l’Elysée là où Karim Benzema n’avait même pas eu la chance de disputer l’Euro ? Finalement, le seul point commun entre les deux sportifs — François Fillon est pilote automobile à ses heures perdues —, c’est le rejet de la part des Français, qui étaient 82 % à se prononcer contre le retour de Benzema en équipe de France. Ils sont aujourd’hui 72 % à ne plus vouloir de François Fillon en équipe de France. Dommage que Didier Deschamps, si prompt à balayer d’un revers de la main la présomption d’innocence, ne soit pas président des Républicains.