LeMuslimPost : L’Etat d’Israël a publié une liste noire sur laquelle sont inscrits le mouvement BDS et des organisations antisionistes, y compris des associations juives et d’autres qui ont combattu les nazis pendant la Seconde guerre mondiale. Est-ce là un nouvel enfoncement d’israël ou bien n’êtes-vous pas surprise ?
N’est-ce pas inquiétant qu’un pays qui affirme être la seule démocratie au Moyen-Orient établisse une « liste noire » comme celle-ci ?
Je pense qu’internet et la démocratisation de l’information ont depuis longtemps levé le rideau sur la prétention d’Israël à être une démocratie. Les Palestiniens représentent environ 20 % de la population d’Israël, mais leurs droits sont limités en raison de dizaines de lois qui accordent des privilèges spéciaux uniquement aux juifs.
« Cette liste est une tentative d’intimidation »
Comment des organisations comme Jewish Voices For Peace ont-elles réagi lorsqu’elles ont appris leur présence sur la liste ?
Plusieurs membres de Jewish Voice for Peace ont été empêchés de monter à bord de leur vol à destination de Tel-Aviv, au départ de Washington DC l’été dernier. Nous n’imaginons donc pas autre chose que d’être sur cette liste.
Jewish Voice for Peace a commencé à s’engager dans des actions de boycott partiel en 2005. Notre directrice exécutive, Rebecca Vilkomerson, a été interviewée par le New York Times et a estimé que la liste noire était faite pour intimider. Les partisans du mouvement hors d’Israël seront affectés, mais les victimes qui seront les plus touchées pourraient être des Palestiniens vivant en Israël avec des permis temporaires, y compris des conjoints d’Israéliens qui sont citoyens ou qui ont une résidence permanente. Selon la loi, les citoyens et les résidents permanents ne peuvent pas perdre leur statut pour avoir soutenu le mouvement, mais ceux qui ont un permis de séjour temporaire peuvent voir leur permis révoqué.
Y a-t-il des actions planifiées pour dénoncer cette liste ?
Avec nos membres, nous allons déterminer le meilleur plan d’action d’action possible, nous sommes une organisation réfléchie qui ne réagit pas de façon intempestive.
Comment expliquez-vous un tel silence de la part des principaux médias sur ce sujet ?
Le silence semble être normal, notamment dans les grands médias américains, qui sont toujours réticents à critiquer Israël ou à rendre compte des violations des droits humains et civils des Palestiniens. Je suis heureuse que nous ne dépendons plus de ces médias pour rendre compte de ce qui se passe en Palestine et en Israël ou dans d’autres parties du monde où l’Amérique a des intérêts militaires.
« Il est faux de prétendre que l’antisionisme est synonyme d’antisémitisme »
Le président français Emmanuel Macron, ainsi que son Premier ministre, ont répété que l’antisionisme était une nouvelle forme d’antisémitisme, quelle est votre réponse à cela ?
Je suis toujours surprise quand des chefs d’Etat disent des choses aussi absurdes, probablement à la demande des responsables israéliens ou des organisations juives desquelles ils souhaitent obtenir des faveurs. Le sionisme était le mouvement politique de création d’un état juif par les juifs et pour les juifs, et les dirigeants de ce mouvement ont choisi de le faire en Palestine, qui était majoritairement musulmane avec une grande minorité chrétienne et une plus petite minorité juive. L’antisémitisme est une forme de discrimination et de haine envers les personnes uniquement parce qu’elles sont juives. Tous les juifs ne sont pas des sionistes. En réalité, beaucoup d’entre nous ne le sommes pas, et beaucoup d’entre nous sommes opposés à la politique de l’Etat d’Israël.
Quand vous voyez le soutien grandissant envers Ahed Tamimi, des artistes comme Lorde répondant aux appels au boycott ou d’autres comme Vic Mensa qui établissent clairement un parallèle entre la lutte palestinienne et le mouvement Black Lives Matter, quelle est votre réaction ?
Je suis heureuse de voir différents mouvements avec des luttes communes s’unir pour se soutenir mutuellement. Tous les systèmes d’oppression sont connectés.
« Nous voulons plus de solidarité »
Vous avez fait partie d’une opération de rapprochement entre activistes français britanniques et américains l’été dernier à South Central à Los Angeles, quelle est votre approche en terme de connections entre les rives de l’Atlantique ?
C’était une conférence fantastique et informative et je me sens honorée d’y avoir été invitée. Je suis très heureuse d’avoir noué de nouvelles relations merveilleuses avec des organisateurs étrangers et j’ai hâte de collaborer avec certains d’entre eux cette année. J’aimerais que cela devienne un événement annuel dans un pays différent. Je réfléchis encore et raconte des choses que j’ai apprises là-bas avec d’autres organisateurs avec qui je travaille ici à Los Angeles.
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