Le Commission des droits de l’Homme de l’ONU a envoyé une lettre à 150 entreprises israéliennes et multinationales qui opèrent de manière « directe » ou « indirecte » dans les territoires occupés palestiniens. Cette lettre fait suite à la résolution votée en mars dernier pour que soit établie une « blacklist » des entreprises impliquées dans la violation du droit international. Selon le WashingtonPost, parmi ces entreprises, figurent Caterpillar, Priceline, TripAdvisor et AirBnB, mais aussi d’autres entreprises. La nouvelle n’a pas manqué de faire réagir le gouvernement israélien qui est en train de faire pression pour que la liste ne soit divulguée. Les Etats-Unis de leur côté ont menacé de quitter tout bonnement la commission.
L’effet a été quasi immédiat. Le bureau des affaires stratégiques du ministère israélien de l’Economie a indiqué avoir été informé que plusieurs de ces entreprises ont répondu à la commission qu’elles ne renouvèleraient pas leurs contrats. Cette liste noire, si elle est divulguée, porterait un sérieux coup à l’image des multinationales concernées. L’ancien ambassadeur d’Israël au Canada a pour sa part directement critiqué le président jordanien de la Commission en l’accusant d’être « totalement hostile à Israël. » Mais les effets du boycott se sont aussi fait ressentir en Jordanie où le bureau de l’ONU sur place a arrêté de travailler avec l’entreprise G4S, qui est déjà accusée d’avoir collaboré avec l’occupation israélienne.
Thank you #UNwomen for ending your contract w/ occupation profiteer @G4S . Only @UNDPJordan left, what a shame. @zenaaliahmad pic.twitter.com/3ncWG4mciE
— Jordan BDS (@BDSJordan) 3 octobre 2017
Ces décisions ont remis sur la carte la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanctions) qui œuvre depuis 2009 contre « l’occupation israélienne des terres arabes palestiniennes » par la voie du boycott économique et culturel. Pour Imène Habib, animatrice du réseau BDS France, cette mise ne garde est « un pas positif dans la bonne direction. » Rappelant le « fort soutien » dont jouit BDS France au sein de la société civile, l’activiste a informé LeMuslimPost que les prochaines entreprises « impliquées dans les graves violations des droits des palestiniens » qui sont visées par la campagne sont Hewlett Packard, accusée de fournir le matériel de surveillance du mur de séparation — lui même jugé illégal par l’ONU — et l’entreprise Elbit, spécialisée dans la fabrication d’armement, de drones militaires et d’équipements de surveillance. Cette dernière, encore une fois sous la pression de BDS, vient de perdre un appel d’offre pour des simulateurs lancé par la Royal Flying Doctor Service en Australie. L’autre entreprise ciblée par BDS et qui refuse de céder est le groupe AXA, investisseur dans trois banques israéliennes, elles-mêmes impliquées dans la construction de colonies israéliennes.
Face à la popularité de la campagne et ne pouvant plus minimiser sa réelle portée, Israël s’est depuis engagé dans une surveillance étroite du mouvement BDS et l’enregistrement des citoyens israéliens qui « soutiennent » ou « font la promotion » de la campagne. Mais le procureur général Avichai Mendelblit s’y est frontalement opposé en questionnant la légalité d’un tel procédé. Avec ou sans l’aide de l’ONU, la campagne BDS, malgré sa criminalisation en France et les tentatives d’en faire de même aux Etats-Unis ou ailleurs, ne semble pas s’essouffler. Mais si l’ONU mettait sa menace à exécution, ce serait un accomplissement majeur pour une mouvement issu de la société civile qui aurait réussi là où les Etats ont échoué.