jeudi 31 octobre 2024
11.1 C
Paris

Port du voile : vers une interdiction plus étendue en entreprise ?

En 2008, Asma B, est embauchée comme ingénieure d’études chez Micropole Univers, et porte le voile au sein de cette entreprise privée, sans que cela ne cause de problème à son employeur. Mais après son intervention chez un client à Toulouse, celui-ci se plaint de son voile, qui aurait « gêné un certain nombre de ses collaborateurs ». Le client demande également à son supérieur « qu’il n’y ait pas de voile la prochaine fois ».

Suite à cet évènement, l’employée est licenciée sans préavis, en 2009. Micropole Univers estime que son foulard a entravé le développement de l’entreprise. A l’ époque, les jugements des prud’hommes puis de la cour d’appel estiment que le licenciement est fondé sur « une cause réelle et sérieuse ».

Mais le 22 novembre 2017, la Cour de Cassation a fini par donner raison à Asma B, en se basant sur l’avis de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE). En effet, en mars 2017, elle a donné le feu vert aux entreprises privées souhaitant exclure le voile de l’entreprise. 

La CJUE a cependant imposé certaines conditions, pour éviter les discriminations. 

L’entreprise doit stipuler dans son règlement l’interdiction pour tous les salariés de porter sur le lieu de travail, des signes visibles de leurs convictions politiques, philosophiques ou religieuses.

« Cet arrêt donne le mode d’emploi aux entreprises pour proscrire le port du voile »

Pour autant, il n’est pas question de cibler une confession plus qu’une autre. Cette restriction ne doit pas concerner uniquement les femmes musulmanes portant un foulard. Pour bannir ce dernier, l’entreprise doit justifier son choix par « un objectif légitime tel que la poursuite par l’employeur, dans ses relations avec ses clients, d’une politique de neutralité ». 

Dans le cas de Asma B, cette interdiction était absente du règlement intérieur au moment des faits. Ainsi, son licenciement n’était pas justifié. De plus, la Cour de cassation a estimé que la requête du client ne pouvait être considéré comme une « exigence professionnelle, essentielle et déterminante ».

« La salariée obtient gain de cause et c’est une bonne chose pour elle, car elle a été victime de discrimination directe de la part du client. Mais cet arrêt permet de rendre possible l’interdiction du foulard sous plusieurs conditions et donne le mode d’emploi aux entreprises privées », nuance l’avocat Henri Braun. 

En effet, nombre de sociétés pourront utiliser ce cas et l’avis rendu par la Cour de justice européenne pour rédiger des règlements internes visant directement les employées musulmanes, en évitant intelligemment d’être accusées de discrimination. 

Vers un recul de la liberté religieuse et d’opinion ?

Pour Henri Braun, l’interdiction de signes religieux, politiques et philosophiques fait reculer à la fois la liberté religieuse mais aussi la liberté d’opinion, surtout en s’étendant au secteur privé. 

« Si je suis admirateur de Spinoza et que je manifeste mon intérêt pour ses thèses en entreprise, alors cela pourra m’être reproché ? On donne la possibilité à l’employeur d’empêcher toute manifestation d’opinion », s’inquiète l’avocat spécialisé dans le droit du travail. 

« On voit que les directives européennes prennent le dessus et qu’elles vont plus loin dans les restrictions, conclut Henri Braun. Finalement cet arrêt pose plus de questions qu’il n’en résout ».

Actualités en direct

Pourquoi de nombreux musulmans hautement qualifiés choisissent-ils de quitter la France ?

L'étude "La France, tu l’aimes mais tu la quittes"...

Chems-Eddine Hafiz et la mosquée de Paris en plein « doute »

La Grande mosquée de Paris attend la Nuit du doute pour annoncer la date de l'Aïd. L'objectif n'est pas d'observer la Lune mais de s'aligner sur certains pays. Un procédé qui sème la zizanie.

Gaza : la censure de la vérité

La philosophe américaine Judith Butler ne participera pas aux conférences auxquelles elle était invitée, au centre Pompidou, après avoir rappelé que le Hamas était un mouvement de résistance.

Averroès et la solidarité des musulmans de France

En difficulté financière après la rupture de son contrat avec l'Etat, le lycée Averroès a obtenu plusieurs centaines de milliers d'euros de dons.

L’Allemagne récidive, après la Shoah

Le Nicaragua accuse l'Allemagne, devant la Cour internationale de justice, de faciliter le génocide perpétré par Israël à Gaza.

Les brèves

Chems-Eddine Hafiz et la mosquée de Paris en plein « doute »

La Grande mosquée de Paris attend la Nuit du doute pour annoncer la date de l'Aïd. L'objectif n'est pas d'observer la Lune mais de s'aligner sur certains pays. Un procédé qui sème la zizanie.

Gaza : la censure de la vérité

La philosophe américaine Judith Butler ne participera pas aux conférences auxquelles elle était invitée, au centre Pompidou, après avoir rappelé que le Hamas était un mouvement de résistance.

Averroès et la solidarité des musulmans de France

En difficulté financière après la rupture de son contrat avec l'Etat, le lycée Averroès a obtenu plusieurs centaines de milliers d'euros de dons.

L’Allemagne récidive, après la Shoah

Le Nicaragua accuse l'Allemagne, devant la Cour internationale de justice, de faciliter le génocide perpétré par Israël à Gaza.

Israël : la fin de l’impunité ?

Des juges britanniques demandent au Premier ministre Sunak de stopper la vente d'armes à Israël et lui suggèrent de sanctionner les responsables israéliens.

Espagne : vers la reconnaissance de l’Etat palestinien

Le gouvernement espagnol veut reconnaître l'Etat palestinien avant l'été. L'annonce est prévue pour le 9 juin.

Sur fond de génocide en Palestine, l’iftar de la Maison-Blanche annulé

Les invités de l'iftar de la Maison-Blanche ont refusé de rompre le jeûne avec le président Biden qui doit, selon eux, revoir sa position sur Israël.
Quitter la version mobile