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Racisme décomplexé : Ardisson, Praud, Pujadas… idéologues et alors ?

« On ne peut pas, même s’il y a des décennies entre, tuer des millions de juifs pour faire venir des millions de leurs pires ennemis après. » La petite phrase de Karl Lagerfeld dans « Salut les Terriens ! » a fait polémique ce week-end.

Face au couturier, Ardisson acquiesce, sourire aux lèvres. L’homme en noir aurait pu couper la séquence au montage, mais il a préféré la garder. Buzz assuré.

« Une culture antisémite dans les familles musulmanes »

Dans la même émission, Ardisson a lui aussi fait un raccourci étonnant : « Soyons honnêtes : dans les familles musulmanes, aujourd’hui, qui vivent en France, est-ce qu’il n’y a pas une culture antisémite ? » Une question qui sous-entend en réalité une affirmation, même si l’animateur assure que « ce n’est pas une critique du monde musulman. »

https://www.youtube.com/watch?v=WCT9ggYv9n0

Islamophobe, Thierry Ardisson ? L’animateur a de la bouteille et sait parfaitement répondre à cette accusation : « Je ne critique pas l’Islam, j’ai peur des islamistes », se défend-il. Par le passé, Ardisson a invité toutes sortes de personnes, brouillant ainsi les pistes. Mais depuis plusieurs mois, il n’hésite pas à se laisser aller à quelques raccourcis dignes de la « réacosphère » : avant l’antisémitisme des familles musulmanes, il avait évoqué l’affaire du bar de Sevran.

« Le café, par exemple… Quand on dit qu’il n’y a pas de femmes dans les cafés, et le mec dit : ‘Bah oui, au bled, y’a pas des femmes dans les cafés.’ Eh bien ici, on n’est pas au bled, on est en France. » Ardisson avait alors balayé d’un revers de la main la contre-enquête du Bondy Blog parce que Mehdi Meklat y avait, un temps, collaboré. « Ne me parlez pas du Bondy Blog, parce que je vais vous parler de Mehdi Meklat, qui est encensé par la gauche islamo-gauchiste », déclarait l’animateur. « Islamo-gauchiste », le terme est lancé. 

Les années passent et Ardisson a fini, comme bien des dinosaures du paysage audiovisuel français, par devenir la caricature de lui-même. 

« De France 2 à LCI, Pujadas emporte le café de Sevran avec lui »

Cette volonté de ne voir la vérité que par un prisme — en l’occurence, dans le cas du café de Sevran, on préfère faire confiance à une militante qu’à un site qui a fait ses preuves — n’est pas sans conséquences : à force qu’on le lui rabâche ces informations non vérifiées, désormais, le public les a assimilées, comme si elles étaient vraies. C’est le cas du café de Sevran, mais aussi des prétendus chauffeurs de bus islamistes qui refuseraient de prendre le volant après une femme à la RATP — une rumeur démontée ici par Libé —.

Et bien que les bases du journalisme, à commencer par le recoupement des faits, ne soient pas respectées, les journalistes laissent les personnalités qu’ils interviewent déblatérer des énormités sans même les contredire. Et ce aussi bien à la télévision que dans la presse écrite. Comme lorsque Manuel Valls a évoqué, a priori sans sourciller, les prétendus chauffeurs de bus islamistes dans Le Figaro Magazine, début octobre. Ce manque de réaction à ce qui ressemble fort à une « fake news » est-il de l’incompétence ou permet-il de faire passer une idéologie ?

Le phénomène des « fake news » n’est pas un problème spécifique à l’Amérique de Donald Trump. Bien au contraire, qu’il s’agisse de paresse intellectuelle, de parti pris idéologique ou tout simplement de la culture du buzz permanent, la presse française, à quelques exceptions près, ne manque pas une occasion pour se décrédibiliser un peu plus. Sous couvert de « liberté de ton » ou de sortir du « politiquement correct », les propos qui, sous un autre angle seraient inacceptables, Ardisson comme Pujadas ou d’autres chez Marianne ou Charlie Hebdo expriment, de manière décomplexée, une médiocrité protégée par les privilèges.

Dernier exemple en date avec David Pujadas. Lors d’un débat qu’il animait avec, autour de la table, Philippe Val et Amine El Khatmi entre autres, le journaliste a à nouveau parlé du reportage sur le café de Sevran initialement diffusé par France 2, chaîne sur laquelle il officiait à l’époque. « De France 2 à LCI, Pujadas emporte le café de Sevran avec lui », écrit Arrêt sur images. Sauf que, depuis, une contre-enquête du Bondy Blog a montré que le reportage avait été bidonné. Et pour cause, aucun journaliste n’avait mis les pieds dans le troquet, France 2 se limitant à diffuser des images tournées par la présidente de l’association La Brigade des Mères, Nadia Remadna, sans aucun travail de vérification.

Quand Pascal Praud, sur son plateau, laisse dire que l’UOIF est majoritaire au sein de la communauté musulmane — même une enquête de l’institut Montaigne prouve d’ailleurs que c’est faux, c’est dire ; quand David Pujadas fait vivre le mythe du café de Sevran qui ne laisserait pas les femmes s’assoir à ses tables ; quand Ardisson parle d’antisémitisme chez les musulmans sans s’être appuyé sur aucun chiffre officiel, c’est la crédibilité des médias qui en prend un coup. Nous ne sommes pas là face à des journalistes ou des amateurs, mais à des idéologues qui diffusent des informations erronées pour faire passer un message. Sans n’avoir aucune conscience du danger de faire de simples rumeurs des faits avérés.

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