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Racisme aux Etats-Unis : « Trump sous-estime le pouvoir du sport dans la société »

Il y a un an, Colin Kaepernick, le quaterback de l’équipe de football américain des San Francisco 49ers, boycottait l’hymne américain et déclarait : « Je ne vais pas afficher de fierté pour le drapeau d’un pays qui opprime les Noirs. » Il avait alors posé un genou par terre, en soutien aux Afro-Américains violentés par la police. Douze mois plus tard, le président Trump a remplacé Barack Obama. Mais les joueurs de football américain, eux, continuent de protester contre les violences raciales et sociales faites aux Afro-Américains en posant le genou par terre au moment où est joué l’hymne national. Ce qui n’est pas du goût de Donald Trump, qui a décidé, la semaine dernière, de critiquer les footballeurs militants :  « Nous sommes fiers de notre pays, notre respectons notre drapeau », a indiqué le président américain, qui a posé à ses compatriotes une question… « N’aimeriez-vous pas que, quand un joueur manque de respect à notre drapeau, les président d’équipe de NFL (la Ligue nationale de football, ndlr) disent : ‘Dégagez moi ce fils de pute du terrain ! Il est viré’ ? »

« Se tenir debout par les bras c’est bien, s’agenouiller c’est inacceptable »

Ce week-end, les regards étaient logiquement portés sur les joueurs de football américain. Les insultes de Donald Trump ont en effet engendré une grande vague de soutien aux Afro-Américains. Ce dimanche, de nombreux joueurs du club champion en titre, les New England Patriots, mais également des Cleveland Browns ont posé le genou par terre. Dans le même temps, des footballeurs noirs levaient le poing, comme l’avaient fait Tommie Smith et John Carlos sur le podium des JO de Mexico en 1968. Dans une autre rencontre, les joueurs des Seattle Seahawks et ceux des Tennessee Titans ont carrément refusé d’être présents sur le terrain au moment de l’hymne.

Donald Trump a apprécié que les joueurs se tiennent par le bras mais n’a visiblement pas aimé que certains s’agenouillent. « Se tenir debout par les bras c’est bien, s’agenouiller c’est inacceptable », a écrit le président américain sur Twitter. Le chef d’Etat semble être entré dans une bataille rangée avec les footballeurs américains. Si bien que les patrons de la NASCAR ont, de leur côté, menacé ceux qui seraient tentés de boycotter l’hymne américain, indique The Guardian.

« Dans le sport, ce qui compte c’est le niveau, pas la couleur de peau »

En critiquant les sportifs, le président Trump touche à une véritable religion outre-Atlantique. « Je pense que Donald Trump sous-estime le pouvoir du sport dans la société et notamment son pouvoir d’influence auprès des spectateurs — souvent issus de milieux populaires et pas que chez les Blancs — pour qui les joueurs de foot sont de vrais héros, mais aussi auprès des entreprises et des sponsors qui n’ont pas envie d’avoir une image de racisme collée à eux, et auprès du militantisme anti-raciste », explique Marie-Cécile Naves, auteure du livre « Le pouvoir du sport »* (avec Julian Jappert) et de « Trump, l’onde de choc populiste »*. D’ailleurs, rappelle la cofondatrice du site Chronik, la NFL a diffusé, dimanche, un clip qu’elle a réalisé pour rappeler l’importance de la tolérance et la richesse de la diversité aux Etats-Unis. « Le sport véhicule plusieurs valeurs, comme l’égalité, la méritocratie, la tolérance, explique Marie-Cécile Naves. Ce qui compte c’est le niveau, pas la couleur de peau. » L’écho anti-Trump, ajoute-t-elle, est « immense » dans le milieu du sport. Pour Khalil G. Muhammad, professeur d’histoire à Harvard, « le président Trump a tracé une ligne rouge et la plupart sont restés derrière. » Des propos confirmés par la majorité de joueurs qui n’ont pas posé le genou à terre ou pris position sur la question du racisme.

« Trump ne supporte pas que les Afro-Américains revendiquent l’identité américaine autant que les Blancs »

Surtout, Donald Trump s’enfonce semaine après semaine dans un racisme de plus en plus décomplexé. « Ce qui choque, c’est le deux poids-deux mesures du racisme de Donald Trump, explique Marie-Cécile Naves. Il traite de ‘fils de pute’ un joueur noir qui s’agenouille devant le drapeau quand, en août, il explique que, chez les suprémacistes, il y a aussi des ‘very nice people’. » Pour l’auteure de « Trump, l’onde de choc populiste », le président américain « ne supporte pas que des Afro-Américains lui répondent, refusent de venir à la Maison-Blanche et revendiquent l’identité américaine autant que les Blancs. » Lors de sa campagne, Donald Trump avait demandé « le vote de chaque Afro-Américain souhaitant voir sa situation s’améliorer » et avait assuré que, après quatre ans, il obtiendrait « 95 % du vote des Afro-Américains. » Au vu des dernières sorties du président américain, cet objectif semble s’éloigner définitivement. Le professeur Muhammad résume d’ailleurs assez bien la situation actuelle : « le combat continue », dit-il.

* « Le pouvoir du sport » (éditions FYP, 2017) et « Trump, l’onde de choc populiste » (éditions FYP, 2016).

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