Voilà deux ans que les députés suisses discutent du concept de laïcité. Réunis dans la Commission des droits de l’homme, ils se chamaillent à propos du projet de loi du conseiller d’État Pierre Maudet. En février dernier, la commission l’a approuvé à une faible majorité. Plusieurs points ont fait l’objet d’un vif débat, comme celui de l’« impôt ecclésiastique » facultatif, actuellement récolté par le fisc suisse pour les églises. Cet impôt sera finalement étendu à tous les cultes religieux, mais pour une durée maximale de dix ans renouvelables une fois.
C’est l’enjeu des discussions autour de ce projet de loi : délimiter les rapports entre l’Etat et les communautés religieuses. C’est maintenant au Grand Conseil de s’attarder sur le dossier. Pour un des députés, il est impératif de modifier les vieilles lois, totalement « désuètes » pour « adapter le droit aux réalités d’aujourd’hui. » Sauf que d’autres élus estiment que les lois actuelles sont suffisantes. L’opposition estime d’ailleurs que « légiférer de manière spécifique sur le fait religieux est même contraire à la neutralité de l’Etat dans les affaires religieuses. »
Des signes religieux interdits dans l’espace public ?
Dans le projet de loi, il était également question du port de certains vêtements ou signes religieux ostentatoires dans l’espace public. Le texte ne prévoit pas de restriction particulière, si ce n’est que les graves troubles à l’ordre public dus à ces vêtements et signes religieux seront punis. Une réponse vague qui pourrait donner lieu, comme ce fut le cas en France pour le burkini, à des interdictions totalement arbitraires. Mais c’est le Conseil d’Etat qui aura le dernier mot sur la restriction ou l’interdiction des signes religieux dans l’espace public pour les différents cultes. Seule obligation pour les Suisses : avoir le visage découvert, ce qui exclu de facto le port de la burqa.
Pour Pierre Maudet, auteur du projet de loi, « la loi sur la laïcité servira de pare-feu. » Le texte, explique-t-il, doit être « un instrument aujourd’hui nécessaire pour prévenir sereinement les tentations extrémistes et la montée du fanatisme, de l’intégrisme, du prosélytisme et du communautarisme. » Sauf qu’une partie des élus estime aujourd’hui qu’il était inutile de légiférer, voire contre-productif.