Les Gazaouis sont appelés à se rassembler en masse non loin de l’hermétique barrière frontalière lourdement gardée par les soldats israéliens. Il s’agit de marquer le premier anniversaire d’une mobilisation appelée les « grandes marches du retour » qui contribuent fortement à maintenir la frontière sous une dangereuse tension depuis un an.
Entre les différents lieux de rassemblement, des milliers d’habitants de l’enclave coincée entre Israël, Egypte et Méditerranée, ont pris la direction de la frontière sous les drapeaux palestiniens aux couleurs noire, blanche, verte et rouge, et sous des pluies éparses, ont constaté les journalistes de l’AFP.
A Malaka, à l’est de la ville de Gaza, la plupart des manifestants se sont tenus à distance de la barrière pour rester hors de portée des tireurs d’élite israéliens. Mais des poignées de Palestiniens se sont approchés à quelques dizaines de mètres, ont incendié des pneus pour obscurcir la visibilité des tireurs, et ont lancé des pierres vers les soldats avant de se replier en courant.
L’armée a riposté en lançant des gaz lacrymogènes et en ouvrant le feu. Des images vidéo de l’AFP montrent un Palestinien visiblement atteint par un tir de riposte israélien emmené à bout de bras et déposé dans une ambulance.
Un Palestinien tué
Preuve des dangers courus près de la frontière, un Palestinien de 20 ans a été tué par des tirs israéliens alors qu’il prenait part, selon des témoins, à une manifestation nocturne à plus de cent mètres de la barrière, avant le début de la grande mobilisation.
Les appels se sont succédé pour une protestation non-violente. Le spectre d’une nouvelle guerre a resurgit ces dernières semaines entre Israël et le Hamas. Ce serait la quatrième depuis que le mouvement islamiste, qui refuse l’existence d’Israël, a pris le pouvoir à Gaza en 2007.
Depuis le 30 mars 2018, des milliers de Gazaouis manifestent toutes les semaines pour réclamer la levée du strict blocus qu’Israël impose depuis plus de dix ans à Gaza, et le droit de revenir sur les terres qu’eux-mêmes ou leurs parents ont fuies ou dont ils ont été chassés à la création d’Israël en 1948. Les rassemblements donnent quasi systématiquement lieu à des violences.
Au moins 259 Palestiniens ont été tués depuis cette date, la plupart lors des « marches du retour », les autres dans des frappes israéliennes de représailles à des actes hostiles en provenance du territoire. Deux soldats israéliens ont été tués.
Palestiniens et défenseurs des droits humains accusent Israël d’usage excessif de la force. Israël dit ne faire que défendre sa frontière.
Entre Israël, le Hamas et les autres groupes armés palestiniens, un énième accès de fièvre cette semaine a fait craindre que l’anniversaire des « marches » ne donne lieu à un déchaînement de violences préludant à un nouveau conflit.
Dizaines de tireurs d’élite
L’armée israélienne a déployé des milliers de soldats, des dizaines de tireurs d’élite ainsi que des chars et de l’artillerie dans l’éventualité où les groupes armés se mettraient par exemple à tirer des roquettes vers Israël.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a prévenu que son pays était prêt à mener une opération « d’envergure » si nécessaire. Mais il a aussi laissé entendre qu’il comptait laisser sa chance à une médiation égyptienne.
Des pourparlers ont eu lieu vendredi sous l’égide de l’Egypte, intermédiaire traditionnel entre le Hamas et Israël. Une délégation égyptienne s’est rendue samedi sur les lieux de la mobilisation.
Le Hamas cherche dans les tractations à alléger le blocus israélien qui étouffe la bande de Gaza éprouvée par les guerres et la pauvreté. Israël justifie le blocus par la nécessité de contenir le Hamas. Il réclame le retour au calme le long de la frontière.
Le Hamas et M. Netanyahu sont sous pression.
Le premier a fait face récemment à des manifestations contre le profond marasme économique, qu’il a sévèrement réprimées.
Le second, confronté à une forte concurrence aux élections, est accusé par ses adversaires de faiblesse face au Hamas.
Ailleurs dans les Territoires palestiniens et en Israël même, Palestiniens et Arabes israéliens sont appelés samedi à prendre part à la « Journée de la terre », hommage annuel à six Arabes israéliens tués en 1976 lors de manifestations contre la confiscation de terres par Israël.