Si vous êtes un aficionado de la magistrale série américaine House of Cards, produite par Netflix et menée par le duo Kevin Spacey et Robin Wright, il n’a pas pu vous laisser indifférent. Campant le rôle de Remy Danton, jeune loup fin stratège de la politique et adversaire du prétendant à la Maison Blanche Franck Underwood (Kevin Spacey), l’acteur américain Mahershala Ali a été l’une des plus brillantes révélations d’une série qui dresse un portrait sans merci des jeux de pouvoir à Washington. Une incarnation qui lui permet aujourd’hui de prétendre sérieusement à l’Oscar du meilleur second rôle masculin pour sa partition dans Moonlight (sorti le 1er février sur nos écrans), où il représente un dealer de Miami, Juan, qui prend sous son aile Chiron, le héros du film : “Il fait beaucoup avec très peu (…) : il le protège, le nourrit, l’encourage à trouver son identité, lui apprend même à nager. Mais Juan est aussi celui qui vend de l’héroïne à la mère de Chiron.”, explique, dithyrambique, le critique cinématographique du Guardian. Au point que le film réalisé par Barry Jenkins, sorti l’année dernière aux Etats-Unis, a déjà remporté pas moins de 140 prix et se positionne, avec huit nominations aux Oscars du 26 février prochain, comme le second favori derrière La La Land, de Damien Chazelle.
« Ma femme a dû retirer son hijab à New York »
Interviewé par Radio Times avant la cérémonie de dimanche, Mahershala Ali (42 ans) évoque sa propre histoire, marquée à 30 ans par sa conversion du christianisme à l’islam. Et par les multiples discriminations que sa famille et lui vivent au quotidien, cumulant les préjugés à l’égard des Noirs et des Musulmans dans une Amérique qui a porté Trump au sommet de l’Etat. Né dans une famille chrétienne pratiquante de Californie – sa mère était même pasteur -, son prénom est issu du plus long nom de prophète présent dans la Bible, Mahershalalhashbaz. Depuis sa conversion et son intégration à la communauté Ahmadiyya, il déplore de constantes discriminations : « Ma femme a dû retirer son hijab à New York, après avoir vécu de nombreuses mauvaises expériences« , affirme-t-il. « Elle ne se sentait plus en sécurité. » Une situation dont il ne minimise pas la douleur mais qui ne représente malheureusement pas un grand bouleversement pour un Noir Américain: « Si vous vous convertissez à l’islam, après avoir été pendant une vingtaine d’années un Noir aux Etats-Unis, la discrimination que vous subissez comme musulman n’est pas un choc », avoue-t-il. « J’ai été pris à partie, on m’a réclamé mon arme, soupçonné d’être un proxénète ou démonté ma voiture », relate-t-il. Après la controverse #OscarsSoWhite née lors de l’édition 2016, un succès de Moonlight – film au casting 100% Américain-Africain – pourrait redonner du baume au coeur à Ali. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.