« Tout le monde parle du culte musulman, sans nous écouter, nous, fédérations. Il y a des propositions dans tous les sens. Tout le monde s’occupe de l’organisation du culte, sauf les premiers intéressés. » Début octobre, le vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Anouar Kbibech, déplorait à mots couverts la tenue des Assises territoriales de l’Islam de France lancées par le ministère de l’Intérieur quelques mois plus tôt et les différentes propositions faites par Hakim El Karoui, qui semble avoir une oreille attentive du côté de l’Elysée. Avec Ahmet Ogras, son président, il appelait à un grand rassemblement qui devait initialement se tenir le 25 novembre prochain à l’Institut du monde arabe.
Ce jeudi, le nouveau ministre de l’Intérieur recevra les responsables du CFCM. L’occasion de jauger les futures relations entre le Conseil français du culte musulman et Christophe Castaner. Car les deux parties ne se sont jusqu’alors jamais officiellement rencontrées. Dans les coulisses de l’organisation musulmane, on s’était réjoui de la nomination de l’ex-député des Alpes de Haute-Provence, tout en redoutant les conséquences de celle de Laurent Nuñez, ancien patron de la DGSI, comme secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur.
Alors, cette première consultation du CFCM par Christophe Castaner devrait permettre de poser les jalons des futures relations entre le ministre et le culte musulman. Depuis le début du mandat d’Ahmet Ogras en tant que président du Conseil, les relations entre le Bureau central des cultes et le CFCM sont inexistantes. Ogras réfléchit actuellement à une refonte de son organisation et espère convaincre qu’il faut lui donner les moyens. Ce sera sans aucun doute l’enjeu de la rencontre de ce jeudi — en fin d’après-midi, nous prévient Libé : éviter que l’argent du halal ou du hajj n’aille dans une autre structure que le CFCM. Et tuer dans l’œuf l’initiative de Hakim El Karoui.
Il sera donc forcément question, place Beauvau, des flux financiers générés par l’« Islam de France ». Ahmet Ogras devrait plaider sa cause. Pour ce faire, le président du CFCM va faire un premier pas vers Castaner en l’invitant au « congrès des musulmans de France », qui aura lieu à l’IMA et dont la date devrait être fixée non plus au 25 novembre mais en fonction de l’agenda du ministre de l’Intérieur. Pour Ahmet Ogras, ce n’est pas pour autant une reddition du CFCM face à la menace de tutelle de la place Beauvau : « On parle ensemble, on l’invite », se défend le président du Conseil. Ce dialogue semble primordial, la survie du CFCM dépend sans aucun doute des bonnes relations que le CFCM entretiendra avec Christophe Castaner.