L’Office centrale de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCCIFF) a remis au parquet financier, hier, les premiers résultats de l’enquête préliminaire concernant les faits susceptibles d’être qualifiés de « détournement de fonds publics, abus de biens sociaux et recels de ces délits », mettant notamment en cause les époux Fillon. Et le verdict de l’OCLCCIFF est sans appel : non, il n’y aura pas de classement sans suite au vu des nombreux éléments déjà recueillis qui ne permettent, en aucun cas, d’envisager un abandon de la procédure. Non, François Fillon n’échappera pas à la justice et au pacte démocratique. Oui, cette fois, la justice ira jusqu’au bout dans son oeuvre, dans le strict respect de la loi et du code de procédure pénale.
« Vous gênez votre parti et vos supporters »
Alors, Monsieur Fillon, vous qui semblez être un fervent et fidèle résistant à la présomption d’innocence, vous que je ne condamne pas, et dont je respecte la présomption d’innocence comme celle de tout autre justiciable, laissez moi me contenter de vous faire remarquer la débâcle dans laquelle vous vous engagez et plongez votre parti. Monsieur Fillon, partez, retirez-vous dignement tant qu’il en est encore temps. Vous, qui affirmez déposer votre destin entre les mains de la justice, faites donc, attendez que celle-ci fasse son travail, sans tenter de la bafouer, en cessant de critiquer ces instances; car, tant que celle-ci, ne se sera prononcée le pacte de confiance avec les citoyens est abîmé, voire même brisé.
Peut-être vous sentez vous victime d’une injustice, de quelques jaloux qui briguent le pouvoir, et cela doit certainement vous torturer ; mais la justice saura faire son oeuvre : retirez-vous et laissez-la prendre le devant de la scène. Car, malgré vos efforts, nous n’avons que pu constater votre difficulté à faire campagne ces derniers jours, dans quelle paralysie et quelle gêne se trouvait votre parti, vos supporters, et cela ne risque guère de s’arranger. L’enquête va durer…
« Et, si vous ayant élu les citoyens se rendaient compte que vous étiez finalement coupable, dans quelques mois ? »
Alors, quoi? Vous espérez que la ferveur aveugle de certains sympathisants de droite vous portera au second tour et que, contre une Le Pen, le front républicain fera bloc derrière vous ? Sans même prendre en compte les accusations possiblement portées contre vous ? Mais ce pari n’est-il pas un peu égocentrique et dangereux ? Un aveu de faiblesse et de volonté de pouvoir ; d’une ambition dépassant la lucidité et le flegme politique ? Et, si vous ayant élu les citoyens se rendaient compte que vous étiez finalement coupable, dans quelques mois ? Vous perdriez tous les suffrages, ne seriez ni respecté, ni légitimé, et illustreriez l’image d’une France corrompue et honteuse…
Alors, Monsieur Fillon, partez, partez, tant qu’il en est encore temps ! Je ne me permettrais en aucun cas de m’ériger en juge et il ne s’agit là que des conseils d’un citoyen qui pense à la démocratie et au statut de President de la République, que je vous délivre humblement. L’acharnement médiatique qui vous accable me rebute en tant qu’homme, et, l’avocat que je suis, vous défend de tant de haine et d’humiliations, dans une situation difficile à vivre, issue de ce besoin social de trouver des bouc-émissaires, et de les détruire avant même que leur quelconque culpabilité ne soit avérée.
« Ce lynchage médiatique, je l’ai vécu »
Car cette situation de lynchage médiatique, de lynchage humain, de violation de la vie privée, fait aussi écho à la mienne, il y a quelques années de cela. Une situation dont j’ai su me relever, mais non sans cicatrices, et que je ne souhaite à personne. En 2003, je défendais Antonio Ferrara. Mon client, s’évadant de la prison de Fresnes, je fus interpellé, le 28 novembre 2005 par l’Office centrale de répression du grand banditisme, et mis en examen pour « complicité d’évasion. » Après avoir été placé sous contrôle judiciaire, puis jugé par la cour d’Assises de Paris, j’ai été condamné à la lourde peine de 7 ans de prison ! C’est seulement en 2010 que la cour d’assises d’appel de Paris m’a acquitté.
Alors, Monsieur Fillon j’ai connu cette gloire, puis cette violente décadence ; j’ai été sali par la presse, rejeté par certains de mes pairs, mal-aimé à cause de rumeurs répandues dans une opinion publique influençable. Je suis vite devenu bouc émissaire et j’en garde encore les stigmates… Je sais comment le monde public est dur, comme il vient polluer jusqu’aux moindres recoins de votre vie privée, comme il peut être un rêve, mais comme il peut rapidement devenir cauchemar… Et j’ai voulu lutter. Comme vous, je n’ai eu de cesse d’affirmer mon innocence. Aussi absurde cela puisse-t-il paraître à ceux qui; rapidement, confondirent « accusé » et « coupable. » Je ne sais si vous êtes innocent ou coupable et je laisse à vos avocats le soin de guider votre défense, seulement je vous assure mon soutien d’homme, j’appelle tous les citoyens à la clémence humaniste et au respect de la présomption d’innocence, mais je vous appelle aussi à laisser faire la justice et à vous retirer de la course à la présidence en attendant que lumière soit faite et vérité instaurée, afin de partir sur des bases saines fondamentales et de ne pas prendre le risque de trahir et de décevoir vos concitoyens.
Peut-être êtes vous innocent, peut-être pas… Quoi qu’il en soit, vous êtes un homme et méritez un traitement qui en soit digne. La culpabilité ou la suspicion ne sont pas des excuses pour abandonner un individu à l’acharnement d’une vindicte populaire, politique et médiatique. À personne je ne souhaite de toucher les nuages, pour venir s’effondrer six pieds sous terre, en une fraction de seconde. Je l’ai vécu ; mais la justice a fini par m’acquitter, par faire son travail. J’ai eu foi en elle. Faites de même. Elle seule sera votre salut.
Mais, en attendant que celle ci délivre son verdict, le seul valable, protégez-vous ainsi que votre famille, et que votre image, qui une fois brisées auront bien du mal à se rétablir. Montrez au peuple que vous l’avez entendu mais que vous saurez répondre, par la voie de la justice, car si, comme vous le clamez, vous êtes innocent, celle ci rétablira la vérité et alors vous atteindrez des sommets encore plus hauts que ceux que vous visiez alors seulement.