Certes, il ne s’agit plus que de quelques ruines. Mais le symbole est, lui, éclatant. Les soldats des forces loyales irakiennes ont repris le contrôle de l’emblématique mosquée al-Nouri de Mossoul, détruite intentionnellement la semaine dernière par les derniers combattants de Daesh, acculés dans leur dernier retranchement. Selon Bagdad, il ne s’agit désormais qu’une question de jours avant que l’armée ne reprenne la totalité de la ville martyre, fief depuis trois ans du futur ex-Etat islamique en Irak et au Levant (EI). Haider al-Abadi, le Premier ministre, a assuré hier soir à l’agence Reuters que la reprise de la grande mosquée de Mossoul signifiait « la fin de cette mascarade d’Etat islamique ». Le communiqué officiel, plus modéré, se contente d’annoncer la « prise de contrôle de la mosquée al-Nouri. Les opérations se poursuivent. » La reconquête de l’édifice historique, connu pour son minaret penché surnommé al-Hadba, est plus qu’une victoire symbolique. Car elle a été le lieu où le leader Abou Bakr al-Baghdadi – aujourd’hui en fuite mais que les Russes donnent pour mort – a proclamé, le 29 juin 2014, son « Califat », un « Etat islamique » utopique et sans frontières qui s’imposerait à l’ensemble de la Oumma musulmane. L’écoeurement de la population de Mossoul (fief sunnite) face au gouvernement central majoritairement chiite, la corruption endémique des forces de sécurité et l’absence de structures étatiques avaient facilité le siège de la seconde ville d’Irak par un amalgame de djihadistes autoproclamés, de rebelles et d’illuminés. Amalgame improbable sur le papier mais qui est parvenu à atteindre les portes de la capitale.
Quid de l’après-Daesh ?
La menace d’une réelle et imminente emprise de Bagdad, ajouté au terrorisme destructeur des djihadistes, a accéléré la formation d’une coalition de forces irakiennes et internationales – détachées par une cinquantaine de pays dont les Etats-Unis – pour contenir puis éradiquer la propagation de l’EI. L’offensive lancée il y a huit mois pour récupérer Mossoul visait entre autres à récupérer le minaret symbolique d’al-Nouri, et à infliger à Daesh une défaite aussi cinglante que symbolique. Dans une politique suicidaire de la terre brûlée, les terroristes avaient procédé la semaine dernière à la démolition en règle d’al-Hadba. Au final, si la bataille est sur le point d’être remportée par les troupes alliées sur le front irakien, et devra encore assurer la survie de quelque 50 000 civils encore pris au piège et utilisés comme bouclier humain dans l’ultime pré carré de l’EI. Il restera ensuite à libérer l’autre ville martyre de Raqqa, en Syrie, mission attribuée à une variété de milices locales placées sous un commandement kurde, lui-même soutenu par les Américains. Là aussi, le compte à rebours est lancé. Avant de songer à un autre défi, peut-être au moins aussi grand : la gestion politique de l’après-Daesh.