Président de la République fédérale du Nigeria depuis neuf mois, Muhammadu Buhari se présente comme le « protecteur de l’islam » qui veut faire de la lutte contre l’extrémisme religieux sa priorité, dans un pays où le nombre de musulmans et de chrétiens est presque équivalent.
Muhammadu Buhari, 73 ans, est un militaire de carrière, dont la carrière politique a été très mouvementée dans son pays du Nigeria. En 1966, il participe en effet à un coup d’Etat sanglant avec le lieutenant-colonel Murtala Muhammad. Dix ans plus tard, il est nommé ministre du Pétrole et des Ressources naturelles, dans un pays qui vit principalement de ses ressources en or noir. 1983, et… deuxième coup d’Etat! Il renverse Shehu Shagari, le président démocratiquement élu. A cette époque-là, Buhari accuse le gouvernement de corruption et prendra alors des mesures radicales comme la suppression de la Constitution de 1979.
Parmi les mesures de Muhammadu Buhari : la « guerre contre l’indiscipline », pendant laquelle il inflige de lourdes sanctions sur les fonctionnaires retardataires et ceux qui trichent parmi les étudiants, proposant des peines allant jusqu’à l’emprisonnement de longue durée. Après deux années de dictature, il est renversé et emprisonné avant de sortir en 1988. Il préside alors le Petroleum Trust Fund, ce qui lui vaut d’être accusé de détournement de fonds. Des accusations qui n’auront jamais été prouvées. En 1998, un rapport de New African salue même la transparence de sa gestion dans cet organisme.
Muhammadu Buhari, le musulman qui se « démocratise »
Durant sa campagne électorale, le candidat de l’All Progressive Congress s’est toujours présenté en tant que « démocrate converti. » Il l’a même souligné dans un discours tenu avant les élections : « Je ne peux pas changer le passé, mais je peux changer le présent et le futur. Vous avez devant vous un démocrate converti. » Visiblement, sa vision de la pratique de l’Islam a connu aussi quelques changements… En 2011, Buhari déclarait, lors d’un séminaire public, que la « charia » devrait être instaurée sur tout le territoire nigérian. Il disait à ce propos : « Si Dieu le veut, nous n’arrêterons pas l’agitation pour la mise en œuvre totale de la charia dans le pays. » Et pourtant, il revient en janvier 2015 avec un discours totalement nouveau, plaidant en faveur de l’union de sa nation et la liberté du culte : « La religion ne doit jamais être utilisée comme une excuse pour diviser, opprimer les autres ou obtenir des avantages injustes », dit-il alors.
L’identité islamique de de Buhari a été toujours pointée du doigt, notamment à cause de sa proximité et de son indulgence vis-à-vis de l’organisation terroriste Boko Haram. L’homme de 73 ans a même été cité par Abubakar Shekau, chef du groupe terroriste, comme étant une personne… de confiance ! Mais le président du Nigeria s’est vite ressaisi et a clarifié sa position vis-à-vis des djihadistes, en les qualifiant « de bigots sans cervelle déguisés en musulmans. » Cette prise de position a failli lui coûter la vie, après un attentat-kamikaze meurtrier revendiqué par ce groupe duquel il a échappé en juillet 2014.
Muhammadu Buhari promet de lutter contre Boko Haram
Après trois tentatives sans succès (en 2003, 2007 et 2011), Muhammadu Buhari finit par gagner la présidentielle en 2015 et succède, de façon assez surprenante, à Goodluck Jonathan, son adversaire qui accepte la défaite. A peine élu, il salue la passation démocratique du pouvoir et appelle rapidement à l’union du peuple nigérian, malgré ses différences culturelles et religieuses. Sa plus grande promesse : celle d’éradiquer le mouvement terroriste Boko Haram, qui met en danger la sécurité du pays et surtout la vie des habitants du nord, qui se sentent marginalisés depuis la progression de cette organisation.