Manuel Valls est-il gonflé ? Le Premier ministre demande aux musulmans de France de s’élever contre Daech, pendant que la France continue à avoir comme alliée l’Arabie Saoudite, accusée de financer l’Etat islamique.
Invité du Petit Journal sur Canal + pour parler des attentats de Paris et de l’Islam, Manuel Valls a assuré « ne pas confondre les choses. » Pourtant, le Premier ministre français indiquait, lors de son passage télévisé, que « l’immense majorité des musulmans français ne supportent pas ce qui s’est passé. » Ici, l’ordre des mots a son importance : Manuel Valls n’a pas choisi de parler des « Français musulmans » mais bien des « musulmans français », mettant une nouvelle fois cette frange de la population au banc des accusés. Le Premier ministre trouve donc que les musulmans de France n’ont rien à voir avec les événements mais leur demande de « se mettre debout » pour « couper toute complaisance vis-à-vis de ces terroristes. »
Valls dit pourtant que « tout cela n’a rien à voir avec l’Islam »
L’attentat survenu à Tunis hier soir – un bus de la sécurité présidentielle a explosé, faisant 13 morts – n’a même pas modifié la position du Premier ministre français. Car la situation, si elle n’était pas tragique, serait ubuesque : Manuel Valls demande aux musulmans de se lever pour se désolidariser d’actes atroces commis au nom de l’Etat islamique contre… des musulmans. « C’est un débat qui ne touche pas que la France, qui touche l’Europe, et qui touche le monde: ce salafisme, cet islamisme radical, est né de l’Islam », a surenchéri le Premier ministre, affirmant : « C’est très important que dans le monde, et bien sûr en France, des voix continuent à s’élever dans l’Islam (…) disant : tout cela n’a rien à voir avec l’Islam, mais comme c’est né au sein de l’Islam aussi, il faut couper cette branche. »
Cette branche, tout le monde en France – et particulièrement chez les musulmans – est d’accord qu’il faille la couper. Encore faut-il trouver comment elle a poussé. « C’est une bataille politique, théologique, sociale, culturelle, qui est majeure et qui est loin d’être terminée », a précisé Manuel Valls. Le Premier ministre a peut-être oublié de préciser que cette bataille est également économique, en plus d’être éminemment politique. Car en passant des contrats de plusieurs milliards d’euros avec l’Arabie Saoudite, Manuel Valls se pose comme un véritable allié des pays wahhabites. « Le wahhabisme est d’abord une secte », écrivait début novembre Eric Geoffroy. Manuel Valls négocie, au nom de la France, avec les pays du Golfe.
Manuel Valls ne s’est pas désolidarisé de l’Arabie Saoudite
Or, lorsqu’il est allé « voler » – selon les termes du Figaro – 10 milliards d’euros de contrats en Arabie Saoudite, Manuel Valls ne s’est à aucun moment demandé quels étaient les liens financiers entre les Saoudiens et Daech. Martine Orange, journaliste chez Mediapart, en est certaine : « Le Qatar et l’Arabie Saoudite ont soutenu Daech. » Aujourd’hui, les Français musulmans attendent des explications de la part de Manuel Valls et demandent que celui-ci se mette « debout » contre le wahhabisme pour « couper toute complaisance vis-à-vis » des Saoudiens. Ou qu’à défaut, il se désolidarise de l’Arabie Saoudite et des pays du Golfe, lui qui n’avait même pas osé évoquer clairement le problème des droits de l’Homme dans la monarchie wahhabite.
Valls veut que l’Islam se mette “debout” pour couper toute “complaisance” envers le djihadisme (ici)