Considéré comme le rite initiatique du passage à l’âge adulte dans sa version occidentale et moderne, l’examen du baccalauréat conserve invariablement une place singulière dans le parcours de chacun. Et le mythe dans ce mythe est personnifié par le premier jour de ce marathon d’une semaine, traditionnellement consacré à l’épreuve de philosophie. Les candidats des filières générale et technologique ont planché ce matin de huit heures jusqu’à midi sur des sujets relativement classiques mais à la tournure parfois assez déconcertante. D’autant plus que certains thèmes semblent avoir été proposés à contre-courant de la série du bac concernée. Ainsi, les littéraires ont été invités à cogiter sur « Suffit-il d’observer pour connaître ? », une question plutôt adaptée à des candidats de profil scientifique. Et inversement : ces derniers ont dû choisir (hors commentaire de texte) entre culture et justice avec les sujets « Peut-on se libérer de sa culture ? » et « Défendre ses droits, est-ce défendre ses intérêts ? ».
De telles interrogations interpellent toutefois par leur référence loin d’être subliminale à l’actualité et aux revendications sociétales d’un pays qui ne jure aujourd’hui que par (une vision déformée de) la laïcité et l’assimilation à une prétendue culture française universaliste, à défaut d’être universelle… Mettons-nous un instant à la place d’un candidat de confession non judéo-chrétienne ou de parents d’origine étrangère pour ressentir sa perplexité, certainement plus prononcée. Il serait particulièrement intéressant, si cela était possible, de comparer les copies – et surtout, les appréciations des correcteurs – en fonction du profil « ethnique » des aspirants bacheliers… Une véritable question philosophique en tant que telle… Mais nous nous égarons : après tout, comme l’un des sujets du bac technologique le suggère, « devons-nous rechercher le bonheur pour le trouver ? »