Quel camouflet pour le gouvernement et pour le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ! La libraire Iqra vient de gagner son référé contre le préfet des Alpes-Maritimes. Le 28 février, la préfecture des Alpes-Maritimes avait prononcé la fermeture administrative de la librairie niçoise pour trois mois, accusant cette dernière de la vendre au public « l’ouvrage fondamentaliste ‘Les grands pêchés’ de l’imam Chams Ad-Dhahabi qui porte atteinte à la dignité de la personne humaine et à la moralité publique ».
Certes, la procédure avait été engagée par la préfecture des Alpes-Maritimes. Mais elle répondait à une volonté du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, de s’attaquer à tous les symboles de l’islam en France. On se souvient que le ministre de l’Intérieur avait obtenu les fermetures administratives du CCIF et de l’ONG BarakaCity, qu’il avait accusés de « propagande » islamiste.
Après avoir obtenu le soutien de son gouvernement et du président Macron, qui ont par exemple désavoué le CFCM pour lancer leurs propres institutions musulmans, parmi lesquelles le Forum de l’islam de France (Forif), Gérald Darmanin est-il en train de perdre sa croisade contre les musulmans de France ?
Le ministre, en tout cas, enchaîne les échecs. On se rappelle, par exemple, du dossier Ahmed Jaballah, dans lequel Darmanin voulait frapper fort. Sauf que l’ex-président de l’Union des organisations islamiques de France a décidé de partir de lui-même en Tunisie et a ainsi évité d’offrir une victoire juridique au ministre de l’Intérieur. Le même ministre qui, dans le dossier Iquioussen, est également sur le point de perdre la face : l’imam demande l’annulation de son expulsion vers le Maroc et pourrait peut-être obtenir gain de cause. Quant à l’imam Mahjoub Mahjoubi, si son référé liberté a été rejeté, il pourrait prochainement revenir au terme d’une longue bataille judiciaire.
À première vue, comme s’en félicite Gérald Darmanin, le gouvernement mène la danse dans plusieurs dossiers. Mais la réouverture demandée par la justice de la librairie Iqra montre que le ministre de l’Intérieur reste très limite quant à la loi. Or, s’il venait à être de nouveau désavoué par la justice, cela sonnerait comme un coup d’arrêt dans sa stratégie de mise sous tutelle de l’« islam de France ».
En effet, la stratégie de Gérald Darmanin est claire : lancer une grande bataille judiciaire pour gagner du temps — les tribunaux mettront des mois, voire des années, à annuler ses décisions —, s’imposer comme l’ennemi d’un islam qu’il qualifie d’anti-républicain et, en parallèle, organiser lui-même le culte musulman. Car toutes ses actions, Darmanin les conduit en affirmant vouloir « une structuration de l’islam de France en fédération » et créer un « statut » d’imam.