Les explosions ont eu lieu dans le quartier du ministère des Affaires étrangères et à quelques mètres de l’ambassade du Qatar qui a été fortement endommagée.
Les explosifs ont été activés alors qu’un des deux véhicules — un camion selon certains témoignages — a été arrêté à un check-point pour être fouillé.
Photos from the scene. In our 10 year experience as the first responder in #Mogadishu, we haven’t seen anything like this. pic.twitter.com/cNxeDD86u6
— Aamin Ambulance (@AaminAmbulance) 15 octobre 2017
Pour le premier ambulancier du pays Aamin, il s’agit du « pire attentat des dix dernières années. » Selon le docteur Aden Nur, à l’hôpital Médina de Mogadiscio, 160 cadavres non identifiables ont été enterrés par le gouvernement pendant que les proches des autres victimes ont précédé aux funérailles de leur côté. A l’heure de publication, les opérations de secours sont toujours en cours.
Les témoignages parlent de corps déchiquetés éparpillés, de familles hurlant à la recherche de leurs proches au milieu des carcasses de voitures calcinées et de la fumée. La plupart des corps étaient méconnaissables et le nombre de disparus a dépassé la centaine. Le ministère de l’Information n’a pas été en mesure de donner tous les noms des victimes et des centaines de familles sont toujours dans l’attente de savoir où sont leurs proches.
Un visage restera peut-être dans les mémoires. Une des victimes, le docteur Maryama Abdullah, venait de terminer ses études de médecine et comptait exercer dans son pays. Comme des centaines d’autres, sa vie s’est arrêtée hier à l’heure de la déflagration.
Dr Maryama Abdullahi had been studying » Medicine » for six years before she was killed in today’s attack in Mogadishu. pic.twitter.com/cjYM9ZayBa
— Hussein Mohamed 🇸🇴 (@HussienM12) 14 octobre 2017
Le président Mohamed Abdullahi Mohamed a réagi en donnant de son sang et déclaré un deuil national de trois jours, appelant son peuple « à l’unité. » De leur côté, malgré leur présence dans le pays, ni l’Union Européenne, ni les Etats-Unis n’ont réagi à l’attentat ou proposé leur aide alors que le bilan ne pourra que s’alourdir.
Within 24-hours of the attack, Turkey is already on the ground coordinating relief efforts. A big thank you! pic.twitter.com/CrrPzaX5fi
— Adam A. Omar (@adancabdulle) 15 octobre 2017
Erdogan, le premier à avoir réagi
Dans les heures qui ont suivi l’attaque, la Turquie a dépêché sur place un avion militaire avec équipements, médicaments et personnel médical pour prêter main-forte aux secouristes sur place. Huit blessés ont déjà été envoyés vers la Turquie pour y être soignés. De son côté, le ministre turc de la Santé a été dépêché vers Mogadiscio pour rencontrer son homologue somalien.
« We will observe 3 days of mourning for innocent victims, flags will be flown at half-mast. Time to unite & pray together. Terror won’t win »
— Villa Somalia (@TheVillaSomalia) 14 octobre 2017
Pour le moment, aucune revendication n’a été rendue publique. Les soupçons portent néanmoins sur le groupe al-Shabab, allié d’al-Qaïda depuis 2012. Cet attentat remettra probablement le focus sur la guerre qui oppose le groupe au gouvernement de transition depuis maintenant une dizaine d’années.
Qui sont les al-Shabab ?
Ḥarakat al-Shabab al-Mujahidin est le plus grand groupuscule Somalien, formé entre 2004 et 2006 suite à la fragmentation d’un autre groupe, l’Union des tribunaux Islamiques, qui avait subi une lourde défaite face aux troupes gouvernementales, elles-mêmes soutenues par l’armée Ethiopienne, l’ONU et l’armée de l’air américaine.
Les objectifs rendus publics d’al-Shabab sont la lutte jusqu’au renversement du « gouvernement fédéral de transition et l’instauration d’un état régi selon leurs orientations idéologiques reposant sur la ‘Salafiyya Jihadiyya.’ » Leur taille est estimée à 8 000 membres avec des liens qui s’étendent du sud de la Somalie au Kenya voisin jusqu’aux réseaux du terrorisme international. L’allégeance prêtée par le groupe à al-Qaïda n’a pas surpris les observateurs étant donné que son premier dirigeant Aden Hashi Ayro avait été militairement formé par les Talibans en Afghanistan.
L’occupation de la Somalie par l’Ethiopie entre 2006 et 2009 a joué un rôle primordial dans l’émergence des al-Shabab comme force militaire incontournable, particulièrement après que l’Union des tribunaux islamiques — dont ils avaient été le bras armé — ait pris le chemin de la fuite. Le rejet d’une force d’occupation étrangère leur a permis de lever des fonds et de recruter grâce au soutien d’al-Qaïda et son réseau international.
Le vide politique qui fait de la Somalie un pays sans gouvernement national depuis plus de vingt ans a laissé le pays en proie aux rivalités internes et aux guerres par procuration menées sur son sol. La sécurité intérieure ne dépend d’ailleurs pas de la volonté du gouvernement mais des Etat-Unis, engagés dans des bombardements par drones contre al-Shabab et la détermination de ces derniers à multiplier les attaques, de l’Ethiopie et du Kenya voisins, qui n’excluent pas d’intervenir à nouveau dans le pays.