Le Parti Républicain du Peuple (CHP), principal parti d’opposition turc, a exigé ce matin l’annulation des résultats du référendum de révision constitutionnelle qui s’est déroulé hier en Turquie. Des résultats qui avaient donné la victoire de justesse au « oui » – par 51,37% des voix contre 48,63% – demandé par Recep Tayyip Erdogan pour étendre ses prérogatives présidentielles. Selon Bulent Tezcan, numéro deux du CHP, les résultats donnés par les médias ne coïncident pas avec ceux censés être obtenus par son parti, d’où la remise en cause. Une demande appuyée par un autre poids lourd, appartenant à l’opposition kurde : le Parti Démocratique des Peuples (HDP). « Nous allons faire appel des résultats du vote : nos données montrent qu’il y a eu manipulation sur 3% à 4% des voix », a indiqué hier le HDP. Ce que ces partis dénoncent repose sur le fait que, peu avant le début du dépouillement, la Commission électorale suprême en charge de l’organisation du scrutin a considéré comme valides des bulletins qui n’avaient pas été dûment scellés par le bureau de vote ce qui, selon un analyste de CNN Turquie, revient à « changer les règles du penalty en plein match ». Ce référendum a pourtant été observé par une délégation conjointe de 63 personnes issues de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) et de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Les porte-parole de cette mission devraient faire part de ses commentaires sur le déroulement du scrutin cet après-midi.
Mainmise sur le gouvernement, la justice et l’armée
Une journée de lundi qui devrait en outre se conclure par la prolongation de l’état d’urgence, en vigueur depuis près de neuf mois, suite au putsch avorté du 15 juillet dernier. Car si la victoire du « oui » devait être avalisée, le président Erdogan, son initiateur et vainqueur, verrait ses pouvoirs considérablement renforcés. En effet, le référendum présentait une série de 18 amendements constitutionnels visant le renforcement du chef de l’Etat. Passage d’un système parlementaire à un système présidentiel, suppression de la fonction de Premier ministre – occupée actuellement par Binali Yildrim -, nomination par le président des ministres du gouvernement et de la moitié du Haut Conseil des Magistrats (chargés de désigner les fonctionnaires du système judiciaires), suppression des tribunaux militaires et possibilité de décréter l’état d’urgence avant de recevoir l’aval du Parlement figurent parmi les mesures clés, comme la restriction à deux mandats présidentiels consécutifs de cinq ans, et qui devraient entrer en vigueur en 2019.