Il a plaidé pour « sortir de certaines postures dans lesquelles nous sommes enfermés », entre « bonne conscience » et « faux durs », dans un entretien à la radio Europe 1.
« La France ne peut pas accueillir tout le monde si elle veut accueillir bien. (…) Pour continuer à accueillir tout le monde dignement, on ne doit pas être un pays trop attractif », a-t-il ajouté, avant un débat parlementaire sur l’immigration à partir du 30 septembre.
Les immigrés représentent 9,7% de la population vivant en France, contre 5% en 1946, selon l’institut national des statistiques.
Emmanuel Macron, qui défend un équilibre entre accueil et fermeté, tente depuis plusieurs mois de ne pas laisser le sujet de l’immigration à ses adversaires, en particulier à l’extrême droite du Rassemblement national (ex-Front national) de Marine Le Pen, qui en a fait son cheval de bataille.
S’il décide de se représenter en 2022, Emmanuel Macron pourrait bien retrouver face à lui Marine Le Pen, qui s’était qualifiée au second tour de la présidentielle en 2017.
« Il ne faut pas faire croire aux gens qu’on serait aujourd’hui débordés par ce phénomène-là ou que la France est un pays qui n’a jamais été un pays constitué pour partie par l’immigration, c’est faux », a soutenu mercredi le président français, donnant des gages à son aile gauche.
Mais il a aussi fait le constat d’un « échec » des objectifs que son gouvernement s’était fixé, notamment sur les reconduites à la frontière pour les clandestins, et demandé un examen plus rapide des demandes d’asile et une intégration plus efficace des demandeurs d’asile avec notamment des cours de français.
« Couper le robinet »
« Aujourd’hui, on est à la fois inefficaces et inhumains, en Europe comme en France », a-t-il reconnu.
A gauche, le chef de file des Verts, Yannick Jadot, a jugé mercredi « dangereux » tout essai pour « instrumentaliser la question de l’immigration pour divertir des sujets comme les inégalités », tout en appelant à « construire une politique européenne digne de ce nom, pour qu’on évite les gens qui meurent en Méditerranée ».
Et le porte-parole du parti communiste, Ian Brossat, a rappelé que « la France a accueilli huit fois moins de demandeurs d’asile que l’Allemagne au cours des cinq dernières années ».
A rebours de ses voisins, la France voit toutefois sa demande d’asile augmenter, avec 19.000 demandes supplémentaires en 2018 (+23%, près de 110.000 demandes au total, ce qui place le pays au quatrième rang dans l’OCDE), dont de nombreux dossiers albanais et géorgiens que les pouvoirs publics estiment largement infondés.
Emmanuel Macron veut aussi « évaluer » l’aide médicale d’État (AME) pour les étrangers en situation irrégulière, qui bénéficie à 300.000 personnes et a coûté près d’un milliard d’euros en 2018, tout en jugeant que la supprimer serait « ridicule ».
Ces propos ont fait réagir le vice-président du RN, Jordan Bardella, selon qui « beaucoup de Français ne comprennent pas qu’alors qu’ils ont de plus en plus de mal à se soigner, on offre les soins gratuits aux clandestins ».
A quelques mois des élections municipales, en mars prochain, Emmanuel Macron avait déjà appelé la semaine dernière sa formation à éviter d’être « un parti bourgeois » qui ignore l’opinion des classes populaires, plus directement confrontées selon lui aux effets de l’immigration et séduites par l’extrême droite.
Le ressentiment face à une immigration « trop forte », la xénophobie et le racisme sont nettement plus marqués parmi les classes dites populaires. Ainsi, 88% des ouvriers et 64% des employés estiment qu’il y a « trop d’étrangers en France », contre seulement 41% des cadres, selon le baromètre annuel Ipsos/Sopra Steria. Globalement, 64% des Français ont l’impression « qu’on ne sent plus chez soi comme avant » en France.