mercredi 21 mai 2025
17.2 C
Paris

Les policiers français musulmans craignent une « chasse aux sorcières »

« Pendant onze mois, je fais mon boulot mais pendant un mois je fais le ramadan, est-ce que ça va faire de moi quelqu’un de radicalisé ? », s’interroge un officier de police, qui a requis l’anonymat.

L’appel du président Emmanuel Macron à bâtir « une société de vigilance », lors de l’hommage aux quatre fonctionnaires tués lors de l’attaque, a laissé « songeur » ce policier expérimenté. « Vu les extrémismes qui montent en puissance dans le pays, c’est dangereux », estime-t-il, soulignant que sa pratique religieuse « n’a jamais posé problème » au travail.

Mickaël Harpon, un informaticien du service de renseignement de la préfecture de police qui a tué à l’arme blanche quatre de ses collègues il y a huit jours à la préfecture de police avant d’être abattu, est présenté par les autorités comme proche de la mouvance « islamiste salafiste ».

Il avait approuvé en 2015 devant des collègues l’attentat jihadiste contre l’hebdomadaire Charlie Hebdo sans que cela fasse l’objet d’un signalement formel, ce qui a conduit le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, à pointer un « dysfonctionnement de l’Etat ».

Après l’attentat, le préfet de police Didier Lallement a invité dans une note chaque agent à « signaler immédiatement et directement à sa hiérarchie » tous les signes d’une « possible radicalisation ».

« Des changements physiques, vestimentaires et alimentaires, le refus de serrer la main du personnel féminin, un rejet brutal des habitudes quotidiennes, un repli sur soi, le rejet de l’autorité et de la vie en collectivité », a notamment détaillé le préfet de police de Paris.

Manque de formation

A la suite de la tuerie commise par Mickaël Harpon, deux policiers de région parisienne ont été privés de leur arme en raison de soupçons de radicalisation islamiste, a indiqué la préfecture de police.

Sans se prononcer sur ces cas, les syndicats ont mis en garde contre le risque d’une « chasse aux sorcières » qui pourrait gagner les rangs policiers, au détriment des fonctionnaires musulmans.

« Il n’y a pas de psychose, mais on sait qu’il y a eu plusieurs signalements depuis l’attaque et des collègues ont été interpellés par leur hiérarchie pour dire s’ils avaient des doutes sur untel ou untel », affirme Linda Kebbab, déléguée nationale du syndicat Unité-SGP-FO.

« Un policier dont la femme est marocaine se demande s’il va avoir des soucis. On en est là », s’inquiète de son côté Noam Anouar, délégué syndical chez Vigi-Police.

« Moi je suis Français avant tout, avec ma religion et en respectant les lois françaises, et ça ne veut pas dire que je suis dangereux. Sinon, autant écarter tous les policiers musulmans », relève un fonctionnaire, en poste dans la sécurité publique à Marseille.

« Il faut dépassionner le débat » et « ne pas confondre dénonciation et délation », selon Rachid Azizi, commandant de police. Cet ancien référent discrimination de la police nationale estime qu’il faut trouver « un juste équilibre », notamment pour « protéger la personne dénoncée des risques d’abus ».

Les syndicats pointent surtout le manque de formation des policiers pour détecter les signes d’une radicalisation, alors que les forces de l’ordre figurent parmi les objectifs récurrents des organisations jihadistes, et que la France a été touchée depuis 2015 par une vague d’attentats islamistes sans précédent qui a fait 255 morts.

« Tout le monde ne peut pas s’improviser du jour au lendemain expert en matière de radicalisation et de détection préalable d’un acte terroriste. C’est un métier et même après plusieurs années d’exercice aux renseignements, on peut se planter », souligne Noam Anouar, passé par la Direction du renseignement de la préfecture de police, où travaillait Mickaël Harpon.

« Des collègues nous disent ‘on ne rasera pas les murs’, mais ils ont peur de se retrouver sur une liste par erreur », rapporte de son côté Linda Kebbab.

Actualités en direct

Ridouan Abagri, victime de son succès ?

Témoignages anonymes d’anciens salariés, accusations infondées… Ridouan Abagri, autodidacte innovant et engagé, est la cible d’une campagne médiatique étrange.

Discrimination en raison de l’origine sociale : quand la France respectera-t-elle les textes internationaux ?

L’origine sociale est considérée comme une source de discrimination. Pourtant, la France tarde à le reconnaître en dépit de preuves patentes. Jusqu’à quand ?

Merwane Benlazar, trop arabe pour la télévision publique ?

L'humoriste Merwan Benlazar, au terme de sa première chronique sur France 5, a été licencié sur ordre de Rachida Dati, qui lui a reproché son look jugé trop... musulman.

Pourquoi de nombreux musulmans hautement qualifiés choisissent-ils de quitter la France ?

L'étude "La France, tu l’aimes mais tu la quittes"...

Chems-Eddine Hafiz et la mosquée de Paris en plein « doute »

La Grande mosquée de Paris attend la Nuit du doute pour annoncer la date de l'Aïd. L'objectif n'est pas d'observer la Lune mais de s'aligner sur certains pays. Un procédé qui sème la zizanie.

Les brèves

Ridouan Abagri, victime de son succès ?

Témoignages anonymes d’anciens salariés, accusations infondées… Ridouan Abagri, autodidacte innovant et engagé, est la cible d’une campagne médiatique étrange.

Discrimination en raison de l’origine sociale : quand la France respectera-t-elle les textes internationaux ?

L’origine sociale est considérée comme une source de discrimination. Pourtant, la France tarde à le reconnaître en dépit de preuves patentes. Jusqu’à quand ?

Merwane Benlazar, trop arabe pour la télévision publique ?

L'humoriste Merwan Benlazar, au terme de sa première chronique sur France 5, a été licencié sur ordre de Rachida Dati, qui lui a reproché son look jugé trop... musulman.

Chems-Eddine Hafiz et la mosquée de Paris en plein « doute »

La Grande mosquée de Paris attend la Nuit du doute pour annoncer la date de l'Aïd. L'objectif n'est pas d'observer la Lune mais de s'aligner sur certains pays. Un procédé qui sème la zizanie.

Gaza : la censure de la vérité

La philosophe américaine Judith Butler ne participera pas aux conférences auxquelles elle était invitée, au centre Pompidou, après avoir rappelé que le Hamas était un mouvement de résistance.

Averroès et la solidarité des musulmans de France

En difficulté financière après la rupture de son contrat avec l'Etat, le lycée Averroès a obtenu plusieurs centaines de milliers d'euros de dons.

L’Allemagne récidive, après la Shoah

Le Nicaragua accuse l'Allemagne, devant la Cour internationale de justice, de faciliter le génocide perpétré par Israël à Gaza.

Editoriaux

Nos Categories