Le 11 octobre dernier, le Défenseur des droits demandait de « surseoir à l’ouverture » de l’annexe du tribunal de Bobigny qui allait ouvrir à l’aéroport Charles-de-Gaulle, au pied des pistes. Malgré la recommandation de Jacques Toubon de suspendre l’idée, l’annexe a finalement ouvert ses portes sans prise ne considération aucune du respect du droit fondamental des personnes qui y seront jugées. Dans ce tribunal de fortune, on ne règlera pas des affaires de droit commun mais les étrangers en situation irrégulière désirant entrer sur le territoire français.
En mai dernier, le Défenseur des droits s’était « autosaisi » de « la prochaine délocalisation des audiences des personnes étrangères à Roissy » pour, disait-il, « vérifier les conditions dans lesquelles les droits procéduraux des personnes jugées pourraient être garantis » et « afin de s’assurer que les conditions pour garantir la publicité des débats judiciaires et l’égalité des armes soient réunies. » Quatre mois plus tard, Jacques Toubon demandait un report du projet, estimant que plusieurs droits « sont susceptibles d’être gravement compromis » par ce dispositif.
Le ministère de la Justice n’a pas entendu les remarques du Défenseur des droits. 20 Minutes rappelle que le projet, suspendu sous Christiane Taubira, a été réactivé par le socialist Jean-Jacques Urvoas. Le nouveau gouvernement a décidé de continuer le travail, assurant que « cette annexe répond à un impératif de dignité et d’humanité. » L’annexe du tribunal a surtout pour objectif, insiste le ministère, de réduire les délais, les étrangers non admis sur le sol français n’ayant que quatre jours pour être jugés.
Outre le Défenseur des droits, continue 20 Minutes, des associations de défense des étrangers — à l’instar du GISTI — et les syndicats des avocats et de la magistrature s’opposaient à la création de cette annexe. Pour ces différents organismes, le fait d’être installé au pied des pistes et de la « zone d’attente » rendra les jugements plus partiaux. Pour Laurence Blisson, secrétaire générale du syndicat de la magistrature, « c’est une justice au bénéfice de la police aux frontières qui gère la zone d’attente et qui est partie au procès. » De plus, se rendre si loin de Paris est un véritable handicap pour les avocats, les traducteurs ou les proches. De quoi craindre des jugements à la hâte.