Heureusement qu’il reste la célébration des journées mondiales pour que le drame vécu par les Rohingya ne tombe pas dans la plus totale indifférence… Hier, la porte-parole du bureau régional du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés (UNHCR) sis à Bangkok a formellement exigé du gouvernement birman des « solutions de long terme » en faveur des Rohingya. Et pour cause : cette minorité musulmane voit ses droits les plus élémentaires niés tant par la population à forte majorité bouddhiste que par le gouvernement d’Aung San Suu Kyi – détentrice au passage du prix Nobel de la Paix 1991. En ce jour mondial des Réfugiés, célébré tous les 20 juin, la minorité Rohingya, victime d’un regain de persécution depuis octobre 2016, s’est malheureusement hissée dans le Top 10 des populations ayant dû abandonner leur foyer et leur terre pour survivre : au moins 74 000 hommes, femmes et enfants ont été contraints de traverser la frontière avec le Bangladesh ces huit derniers mois. « On en trouve encore au Bangladesh, logés dans des camps provisoires », explique Vivian Tan, la représentante de l’UNHCR. Ce qui a fait monter le chiffre des réfugiés Rohingya depuis 2012 à plus de 120 000, y compris ceux confinés à l’intérieur même de la Birmanie, dans l’Etat occidental de Rakhine. Et à l’heure actuelle, toutes périodes confondues, la Birmanie recense quelque 490 000 réfugiés et 375 000 déplacés internes.
Impunité totale
Malgré cette ultime injonction onusienne et des mises en garde aussi répétées qu’inefficaces de la communauté internationale à l’encontre de Naypyidaw, la capitale birmane, il est peu probable que la situation s’améliore significativement pour des personnes considérées par les bouddhistes comme des « immigrants bengalis illégaux ». Une nationalité que leur récuse de toute façon (aussi) le Bangladesh… Or, la persécution d’Etat s’est intensifiée entre octobre 2016 et février 2017, suite à une opération militaire de grande ampleur destinée à venger l’attaque attribuée à des Rohingya de trois postes frontaliers de l’Etat Rakhine, où tente de survivre un million de musulmans. L’offensive a fait se déplacer plus de 20 000 Rohingya et jeté 74 000 autres sur les routes de l’exil bangladaises. En mars dernier, les autorités birmanes avaient tout bonnement interdit à une commission spéciale de l’ONU d’enquêter sur les accusations d’abus, d’exécutions sommaires et de viols, dénoncés par les porte-parole de la communauté et des ONG de premier plan. Ballotés de part et d’autre de la frontière, livrés à eux-mêmes, les Rohingya risquent fort de grappiller quelques places encore au classement des populations réfugiées le 20 juin 2018…