Ça chauffe entre l’Iran et l’Arabie saoudite. La France, qui a des intérêts avec le royaume wahhabite, peut-elle continuer à soutenir un pays qui utilise la même idéologie et les mêmes méthodes que l’organisation Etat islamique ?
Entre l’Iran et l’Arabie saoudite, la guerre froide n’a jamais aussi bien porté son nom. Ce dimanche 3 janvier, l’Arabie saoudite a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Iran. En cause, l’exécution d’un dignitaire chiite en Arabie saoudite, le cheikh Nimr Baqer al-Nimr. Le monde commence alors à prendre position. Mais d’ores et déjà, les jeux sont faits : l’Arabie saoudite finance une partie de la campagne d’Hillary Clinton aux Etats-Unis, alors que le royaume est « le premier client de notre industrie militaire depuis une vingtaine d’années », indique Pierre Conesa, spécialiste des questions de stratégies internationales qui a travaillé au ministère de la Défense.
L’Arabie saoudite, un « Daech qui a réussi » ?
La situation entre l’Iran et l’Arabie saoudite pose aujourd’hui la question des relations de la France avec le royaume. La population française, sur les réseaux sociaux, aime à se demander quelle est la différence entre Daech et l’Arabie saoudite. L’écrivain Kamel Daoud, sur le site du Temps, a expliqué que l’Arabie saoudite est « un Daech qui a réussi. » Si l’Arabie saoudite est menacée par l’Etat islamique, les deux entités ont le même héritage idéologique. Et surtout des méthodes qui se ressemblent. D’ailleurs, le royaume arabe n’a rien à envier à ISIS : depuis le début de l’année, il a procédé à 48 exécutions. En 2015, 153 personnes avaient été exécutées.
« Terrorisme, meurtre, viol, vol à main armée et trafic de drogue sont passibles de la peine capitale en Arabie saoudite, mais aussi des infractions comme l’apostasie, la « sorcellerie » ou l’adultère », précise Le Figaro. Des méthodes moyenâgeuses qui bafouent les droits de l’Homme. Mais la France – Valls avait effectué une visite dans le royaume et est reparti avec 10 milliards d’euros de promesses de contrats – n’ose pas évoquer les droits de l’Homme avec son partenaire. « Oui, nous avons un ennemi, et il faut le nommer : c’est l’islamisme radical », disait Manuel Valls en novembre dernier. Le Premier ministre n’a semble-t-il pas été gêné par l’islamisme radical exercé en Arabie saoudite et ne le sera pas en Iran, lorsque la France négociera avec ce dernier.
L’UE fait part de ses « sérieuses inquiétudes »
Cependant, la situation actuelle qui oppose l’Iran à l’Arabie saoudite aura eu le mérite de faire monter au créneau quelques diplomaties. Comme celle de l’Union européenne, qui a exprimé samedi – avant la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays – ses « sérieuses inquiétudes sur la liberté d’expression et le respect des droits civils et politiques de base », a indiqué le chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini. « Ce cas a le potentiel d’enflammer un peu plus les tensions sectaires qui font déjà beaucoup de dégâts dans la région, avec des conséquences dangereuses », a-t-elle ajouté, demandant à l’Arabie saoudite de faire preuve de « retenue » et de « responsabilité. »
« L’Arabie saoudite est en pleine surenchère avec Daech » (ici)