En Arabie Saoudite, un projet de loi qui vise l’expulsion de cinq millions de travailleurs immigrés a été proposé à Majlis Al-Choura, l’organe consultatif officiel du pays. Dans le quotidien saoudien Okaz, l’initiateur du projet, Sadaqa Al-Fadhel, le défend avec des arguments qui ont de quoi faire rougir les membres des partis extrémistes comme le Front National, « Ces étrangers, dit-il, ne sont pas là pour travailler de manière régulière, ni pour des raisons religieuses (de pèlerinage à La Mecque), mais pour coloniser notre pays. (…) Ils forment comme un peuple intrus qui cherche à s’imposer dans notre pays à travers une occupation sournoise. A long terme, notre pays risque de se retrouver contraint d’accepter leur présence, à cause de pressions internationales. » L’homme politique va encore plus en proposant de créer un département au ministère de l’Intérieur pour « gérer et expulser » les travailleurs immigrés qu’il qualifie tout simplement de… « colons. »
L’enfer c’est les autres
Cette proposition a été bien accueillie par la presse nationale qui se félicite de ces expulsions, mais aussi par une bonne partie de la population. La parole nationaliste gagne du terrain sur les réseaux sociaux avec des slogans comme : « L’Arabie Saoudite aux Saoudiens », nous rapporte le quotidien émirati The National. Dans un pays en plein ralentissement économique, les Saoudiens sont empreints à un nationalisme de plus en plus exacerbé. Il est plus simple pour les autorités de mettre en avant la question identitaire plutôt que les réels problèmes sociétaux et économiques du pays. Dans un pays où la population n’a aucun droit, imaginez un peu la situation de ces travailleurs immigrés, qui ressemble à s’y méprendre à de l’esclavage. La plupart d’entre eux viennent des pays du sous-continent indien et d’autres pays d’Asie, ils sont en majorité très peu qualifiés et effectuent des tâches subalternes, que les « vrais Saoudiens », eux, refusent d’accomplir. Si la loi passe, elle pourrait cependant fragiliser encore un peu plus l’économie du pays… Comment l’Arabie Saoudite compte-t-elle s’en sortir en se passant de cette main-d’œuvre étrangère qui représente quand même près d’un tiers de sa population ?