En Bosnie-Herzégovine, des industriels de la banque, de l’agroalimentaire ou de l’hôtellerie adoptent de plus en plus les certifications halal afin de profiter de la croissance rapide de ce marché, boosté par la taille de la population musulmane et les échanges commerciaux avec les pays du Golfe.
Avec la moitié de sa population musulmane, la Bosnie-Herzégovine s’est imposée ces dernières années comme un hub régional pour les produits et services halal. La première agence bosniaque de certification halal a été lancée il y a déjà dix ans. Ce pays issu de la dislocation de la Yougoslavie, réputé pratiquer un islam libéral, a vu son intérêt pour le développement du halal se renforcer suite à l’arrivée de combattants de nationalités arabes lors de la guerre de 1992/1995 et à l’injection de financements d’Etats du Golfe persique, principalement d’Arabie Saoudite. « Le potentiel du marché halal est élevé car le phénomène est récent et il y a un fossé à combler entre la demande et l’offre », explique Amir Sakic, directeur de l’agence de certification. Et pour cause : au cours de la dernière décennie, le marché du halal dans les Balkans a crû de près de 17% par an.
L’agence dirigée par Sakic a déjà certifié des centaines de produits originaires non seulement de Bosnie mais aussi de ses voisins comme la Serbie, le Montenegro, et même la Lituanie. En Croatie, en Serbie et en Macédoine, l’agence bosniaque a accompagné la création de leurs propres organismes certificateurs. Un intérêt marqué qui n’est guère surprenant : le marché mondial du halal a été valorisé à plus de mille milliards de dollars en 2015, selon le cabinet Deloitte Tohmatsu Consulting et, plus encore, est porté par une croissance dynamique d’environ 15% l’an.
Une certification coûteuse mais profitable
« Chez Klas, tous nos produits sont halal », explique Vasvija Poljo, responsable qualité dans cette société d’agroalimentaire basée à Sarajevo. Revenant sur la confusion encore tenace entre produits halal et absence de porc, il tient à préciser que la certification halal, « c’est beaucoup plus : elle exige que toutes les matières premières doivent être exemptes de pesticides, de métaux lourds, d’OGM, d’antibiotiques ou d’autres éléments nocifs pour la santé humaine ». Le succès du halal s’étend aussi aux services. La Bosna Bank International (BBI), propriété d’investisseurs du Golfe, est la première – et pour l’instant la seule – banque qui opère selon les normes de la finance islamique. Ce qui lui permet de bénéficier d’un portefeuille de projets valorisé à plus de 300 millions de dollars. « L’industrie halal est un sas d’entrée dans le monde musulman car les plus gros investissements aujourd’hui viennet de cette partie du monde », confie Amer Bukvic, le directeur de la BBI qui vient d’inaugurer avec la bourse de Sarajevo le premier indice de valeurs islamiques.
Les investisseurs des pays du Golfe ont d’ailleurs élu la Bosnie et les pays des Balkans de manière plus générale comme de nouveaux et lucratifs débouchés pour leurs fonds. En Serbie et en Bosnie, ils ont racheté de nombreuses terres agricoles et des sociétés agroalimentaires pour pallier les lacunes de la chaîne de production et de logistique des ingrédients et produits halal. Une certification recherchée en Bosnie par les clients les plus divers, y compris les clients de l’hôtellerie. « La première chose que les clients en provenance du monde arabe nous demandent est si disposons d’une certification halal », confirme Saljo Mrkulic, propriétaire de deux importants établissements hôteliers à Sarajevo. « Certes, c’est difficile de maintenir la certification car les produits bio sont plus chers. Mais c’est payant au final : on a davantage de clients », se félicite-t-il.