Dans son arrêt, la CEDH estime qu’il y a eu « violation » des dispositions de la Convention européenne des droits de l’Homme portant sur la protection de la propriété.
L’exécution de sa décision, souligne-t-elle, devra intervenir « au plus tard dans les trois mois » lorsqu’elle sera devenue définitive.
La cour était saisie par une famille de 14 ressortissants de Bosnie-Herzégovine, nés entre 1942 et 1982, dont une vingtaine de proches ont péri lors du génocide de Srebrenica en 1995.
Dans une réaction au magazine en ligne Faktor.ba, l’une des doyennes de la famille, Fata Orlovic, s’est dite « heureuse » de la décision de la CEDH.
« Merci à tous les gens de bien (…) et à tous ceux qui nous ont aidé et qui sont du côté de la vérité. Je me suis battue pendant 20 ans, il n’y a rien qui ne m’ait été épargné et c’est un jour de joie. Je renais aujourd’hui », a-t-elle poursuivi.
Sa famille, propriétaire de plusieurs bâtiments individuels et agricoles, de champs et de prés dans le village bosniaque de Konjević Polje, près de Srebrenica, avait été contrainte de fuir sa propriété pendant la guerre de 1992-1995.
« En 1998, une église fut érigée sur les terres des requérants à la suite d’une décision d’expropriation rendue en faveur de la paroisse orthodoxe serbe de Drinjača », explique la CEDH.
La famille avait obtenu la restitution intégrale de son bien par deux décisions définitives et exécutoires d’une Commission des plaintes des personnes déplacées et réfugiées en 1999, et du ministère chargé des Réfugiés et des personnes déplacées en 2001.
Mais la parcelle sur laquelle avait été érigée l’église ne leur avait pas été restituée.
« La Cour juge en particulier que le manquement des autorités à leur obligation de se conformer à des décisions définitives et contraignantes qui, en 1999 et 2001, avaient ordonné la restitution intégrale de leurs terres aux requérants – inaction que le gouvernement n’a en aucune manière justifiée – a gravement porté atteinte au droit de propriété », ajoute la CEDH.
La famille avait ensuite engagé contre l’Église orthodoxe serbe une procédure civile pour obtenir la restitution de la parcelle et l’enlèvement de l’église, mais avait été déboutée.
En 2004, des affrontements avaient opposé une centaine de Serbes et de musulmans à Konjević Polje devant cet édifice, qui constitue toujours un abcès de fixation entre les deux communautés.
La Cour a condamné la Bosnie-Herzégovine à verser 5.000 euros à la première requérante et 2.000 euros à chacun des autres requérants pour dommage matériel.
Quelque 8.000 hommes et adolescents bosniaques ont été tués dans le massacre de Srebrenica en juillet 1995, un crime qualifié de génocide par la justice internationale. Plus d’un millier restent portés disparus.