L’Etat hébreu se distingue par l’intarissable succession d’actes abusifs, violents et discriminatoires à l’encontre de la population palestinienne, et la crise de l’esplanade des Mosquées n’en est que l’ultime épisode. Un jugement d’un tribunal militaire, rendu hier à propos de l’affaire Azaria – du nom de ce soldat israélien condamné à de la prison ferme pour avoir achevé un Palestinien déjà à terre – rappelle la clémence dont fait preuve la justice vis-à-vis des assassins de Palestiniens. Mais malgré les voix dans le pays qui demandent sa grâce, Azaria fera bien quelques mois de prison. « Nous ne considérons pas convaincante l’affirmation du plaignant selon laquelle il craignait que [le Palestinien] ait été porteur d’explosifs. Après avoir entendu les mises en garde sur une possible explosion, Azaria a attendu deux minutes puis a tiré un coup de feu (…). Il a agi avec sang-froid et sans précipitation. » La stratégie de défense des avocats d’Elor Azaria, basée sur la remise en cause des témoignages de son commandant d’unité, Tom Naaman, et d’un soldat, n’aura donc pas fonctionné : les deux militaires avaient déclaré dans le procès de leur subordonné et collègue d’Azaria avaient indiqué que le Palestinien « méritait de mourir pour avoir poignardé mon ami ». Les avocats ont aussi mis en avant le fait que d’autres représentants des forces de l’ordre – soldats ou policiers -, à l’inverse de leur client, n’ont pas été inquiétés par une procédure judiciaire. Deux arguments que le général Doron Piles, président de la cour d’appel militaire, a tout bonnement rejeté, soulignant notamment que les deux militaires témoins « n’avaient aucun mobile pour un faux témoignage ». Néanmoins, la cour d’appel a également rejeté – par trois voix contre deux – le recours du procureur, qui avait exigé un « renforcement » de la peine d’emprisonnement à 24 mois au lieu de 18.
Deux poids deux mesures
Désormais, Elor Azaria devra donc purger cette courte peine de prison, à moins d’un ultime recours auprès de la cour suprême qui pourrait encore différer son incarcération. Il a aussi la possibilité de demander une réduction de peine au chef d’état-major – à la condition toutefois de reconnaître sa culpabilité – voire, une grâce présidentielle. Les faits s’étaient déroulés en Cisjordanie, à Hebron : deux Palestiniens avaient blessé un soldat de Tsahal, ce qui a immédiatement suscité une riposte de l’armée et résulté dans la mort de l’un des deux jeunes. Le second, Abdelfattah al-Sharif, alors blessé et inoffensif à terre, a alors reçu un tir à la tête quelques minutes après. Si la machine militaro-judiciaire s’est mis en branle, c’est aussi parce que la scène avait été filmée : la publication de la vidéo a alors généré une vague de critiques sur le soldat Azaria, et s’est traduite par des dissensions politiques au sein même du gouvernement de Benjamin Netanyahu. Les faits enregistrés, implacables, ont obligé le Premier ministre israélien à condamner le comportement du soldat. Même si, plus tard, ce fervent défenseur de l’armée « la plus morale du monde » est revenu sur ses propos. La justice est parfois encore plus difficile à accepter que l’injustice. Ça n’est pas une nouveauté les Palestiniens ne sont pas égaux aux israéliens face à la justice, mais quand on connaît les peines encourus par les Palestiniens pour des faits moins grave, il y a de quoi de poser des questions.