Finalement, le gouvernement d’Emmanuel devra se résoudra à faire ce qu’il se sera efforcer depuis plusieurs semaines d’éviter : ouvrir deux nouveaux centres d’accueil pour migrants à Calais, passage obligé mais qui s’éternise avant l’eldorado britannique. Le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, l’a confirmé ce lundi : deux installations seront ouvertes « dans les dix prochains jours ». Une décision qui intervient suite au coup de semonce donné par le Conseil d’Etat. La plus haute instance judiciaire administrative du pays avait, quelques heures auparavant, rejeté l’appel introduit par Collomb et la mairie de Calais pour éviter d’appliquer une ordonnance judiciaire obligeant les autorités publiques à fournir aux migrants un accès à l’eau potable, à des toilettes et à des douches, et à leur faciliter l’accès aux centres d’accueil et d’orientation disséminés sur tout le territoire national afin de traiter les demandes d’asile. Soutenues par le ministre de l’Intérieur qui avait exprimé sa crainte d’un « appel d’air », la municipalité de Calais avait engagé un bras de fer avec diverses ONG qui ne cessaient de dénoncer les dures conditions de vie de ces migrants et l’attitude inhumaine des forces de l’ordre.
« Une injustice pour les habitants de Calais »
Des accusations que reformule donc le Conseil d’Etat. L’institution du Palais-Royal estime que les conditions de vie des migrants – parmi lesquels une centaine de mineurs – « révèlent une carence des autorités publiques », qui ont exposé ces personnes à des « traitements inhumains et dégradants« . Ce qui suppose un « attentat grave et manifestement illégal contre une liberté fondamentale », et la nécessaire mise en place de « dispositifs d’accès à l’eau permettant aux migrants de boire, de se laver et de laver leurs vêtements, et de disposer de toilettes et de douches ». Les nouveaux centres d’accueil pour « ceux qui ont renoncé à leur projet de voyage au Royaume-Uni » seront installés à Troisvaux et à Bailleul, à quelque 90 kilomètres de Calais. Des lieux qui serviront, dans le même temps, au traitement « accéléré » de la situation administrative des hébergés. « Nous ne voulons pas revivre les mauvaises expériences du passé », a expliqué Gérard Collomb. Si le gouvernement prend acte de l’injonction de l’instance présidée par Jean-Marc Sauvé, la sénatrice-maire de Calais, Natacha Bouchart (Les Républicains), n’entend pas pour sa part faire profil bas. « La décision de justice du Conseil d’Etat est une injustice pour les habitants de Calais parce qu’elle les replace sous la menace d’une énième jungle », a-t-elle déclaré via communiqué, ajoutant que, « en l’absence d’une politique nationale et européenne qui offre une solution globale de contrôle de l’immigration, la ville de Calais ne fera pas cas des ordonnances judiciaires émises ». Au grand dam de l’exécutif, la boîte de Pandore est bel et bien rouverte.