La Chambre des représentants, désormais dominée par les démocrates, a approuvé jeudi une résolution condamnant les discours de « haine » mais ne dénonçant pas spécifiquement les propos d’Ilhan Omar, seule élue du Congrès à porter le voile islamique.
Pour le locataire de la Maison Blanche, qui multiplie les attaques contre cette jeune élue du Minnesota dont les déclarations suscitent des tensions au sein de la famille démocrate, ce vote était « une honte ».
« Les démocrates sont devenus un parti anti-Israël, ils sont devenus un parti anti-juifs, et c’est regrettable », a-t-il lancé depuis les jardins de la Maison Blanche, avant de s’envoler pour l’Alabama, Etat du sud qui a été le théâtre de tornades meurtrières.
Le milliardaire républicain a par le passé été accusé de colporter des stéréotypes sur la communauté juive. Et ses propos équivoques après des affrontements entre manifestants antiracistes et néonazis à Charlottesville, en 2017, lorsqu’il avait déclaré voir des gens biens « des deux côtés », avaient suscité un vrai malaise dans son propre camp.
Donald Trump a en même temps contenté Israël en déplaçant l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem.
Le « président qui, quand des néonazis avaient défilé à Charlottesville devant une synagogue et dit +brûlez-là+ avait déclaré que c’était la faute aux +deux côtés+, est tombé plus bas que jamais », a réagi le chef des démocrates au Sénat, Chuck Schumer. « Ses déclarations démontrent que le président ne cherche qu’à jouer la politique de la division et non pas à lutter contre l’antisémitisme. »
Pour l’élue démocrate Elaine Luria, les accusations de M. Trump sont infondées.
« Comme le montre l’Histoire et le vote d’hier (jeudi) à une écrasante majorité pour condamner l’antisémitisme, il existe un soutien fort pour Israël et la foi juive au sein des démocrates », a-t-elle indiqué à l’AFP.
« Allégeance à un pays étranger »
Ilhan Omar, l’une des deux premières femmes musulmanes à siéger au Congrès américain, a dénoncé la semaine dernière le fait que certains lobbies poussent à faire « allégeance à un pays étranger », dans une référence à Aipac, puissant lobby pro-israélien aux Etats-Unis.
De nombreuses voix se sont immédiatement élevées pour dénoncer des propos rappelant, selon elles, le stéréotype sur la « double allégeance » supposée des juifs, qui ne seraient pas « loyaux » au pays où ils vivent.
En réponse à la polémique, les chefs démocrates avaient d’abord fait circuler une résolution centrée sur l’antisémitisme, mais des élus se sont indignés, estimant qu’Ilhan Omar était particulièrement ciblée parce que femme, noire et musulmane.
Le texte de consensus adopté jeudi à une très large majorité condamne l’antisémitisme mais aussi les discriminations anti-musulmanes, ainsi que « l’intolérance contre toute minorité ».
En annonçant le vote, Nancy Pelosi, présidente démocrate de la Chambre des représentants, avait jugé qu’Ilhan Omar n’avait « peut-être pas apprécié la pleine portée » de ses propos. « Je ne pense toutefois pas que son intention était antisémite », avait-elle ajouté.
Condamnant fermement l’antisémitisme, le sénateur et candidat à la présidentielle de 2020 Bernie Sanders, qui est juif, a pris la défense de Mme Omar: « Nous ne devons pas faire d’amalgame entre l’antisémitisme et la critique légitime du gouvernement de droite de Netanyahu en Israël ».
Sur les 535 élus du Congrès américain, 35 sont de confession juive, dont deux républicains, selon l’organisation American-Israeli Cooperative Enterprise.
Lors des élections parlementaires de novembre 2018, 79% des électeurs juifs ont voté pour des candidats démocrates, d’après le centre de recherches Pew.
Ilhan Omar a fui la guerre en Somalie à l’âge de huit ans. Après avoir passé quatre ans dans un camp de réfugiés au Kenya, sa famille s’est installée à la fin des années 1990 dans le Minnesota.