Depuis un an, les pays du Golfe, aidés par plusieurs puissances arabes et africaines, interviennent au Yemen pour tenter de contrer la contestation chiite. Une guerre qui a déjà fait plus de 3 000 victimes civiles.
C’est une opération Tempête décisive qui agit depuis plusieurs mois. Voilà un an qu’une coalition emmenée par l’Arabie Saoudite tente de remettre au pouvoir le président Abd Rabo Mansour Hadi, renversé par l’insurrection houthis au Yemen. Un an de silence. Sauf que l’Organisation des Nations Unies vient de pointer du doigt l’opération menée par dix pays — les pays du Golfe, ainsi que l’Egypte, la Jordanie, le Soudan et le Maroc —, qui a entraîné la mort de « deux fois plus » de personnes que n’importe quelle autre opération. Si un cessez-le-feu a été fixé au 10 avril prochain, avant une reprise des négociations, le bilan humain de l’opération Tempête décisive est lourd, très lourd. Dans l’indifférence générale. Depuis un an, 6 300 personnes sont morte. Pour moitié, ces victimes sont des civils.
22 milliards de dollars contre un ticket pour la guerre
« Il semblerait que la coalition soit responsable de deux fois plus de victimes civiles que toutes les autres forces réunies », a ainsi déclaré le haut-commissaire, Zeid Ra’ad Al Hussein. En s’attaquant à la rébellion de la milice chiite des Houthis, c’est une guerre par procuration que l’Arabie Saoudite livre à l’Iran. Une guerre loin des regards de l’Occident, dont les médias ne se penchent que très peu sur ce conflit. Une guerre dans laquelle le royaume saoudien a réussi à embrigader plusieurs pays, certainement à coups de pétrodollars, que l’on s’étonne de voir bombarder le Yemen. C’est le cas du Maroc, mais également du Sénégal. L’Arabie Saoudite aurait déboursé 22 milliards de dollars pour ses alliés entre janvier 2011 et avril 2014 pour les convaincre d’agir avec eux au Yemen, selon un rapport du FMI. Ainsi, le Maroc a empoché 1,6 milliard de dollars, soit 1,5 % de son PIB. Avec 6,5 milliards de dollars, l’Egypte arrive en tête des pays arabes qui ont bénéficié des dons de l’Arabie Saoudite.
Pourquoi un tel silence des médias ?
Les ONG internationales ont beau alerter médias et autorités, le conflit au Yemen est aujourd’hui passé sous silence. « En fait, la France et la communauté internationale ont démissionné devant la complexité du problème du Yémen. Elles ont donc donné carte blanche à l’Arabie Saoudite », explique Laurent Bonnefoy, chercheur au Centre de recherches internationales (CERI) et spécialiste du Yemen. La remise de la Légion d’honneur au ministre de l’Intérieur saoudien n’est pas, non plus, étrangère au silence français. « Il est étonnant que la France fasse ce choix. Aujourd’hui la France ne se positionne pas pour des raisons d’intérêts économiques avec l’Arabie Saoudite », explique-t-on chez Action contre la faim, qui demande « à la France de se positionner vis-à-vis des violations des droits de l’Homme, de cette crise humanitaire et de l’Arabie Saoudite. »