Il est des situations où, malgré une disposition coranique claire, les croyants font de l’excès de zèle. Ces situations concernent soit les malades, soit les personnes vulnérables ou encore, les voyageurs. Rappelons d’abord une chose fondamentale, point de départ de notre propos : le jeûne est une obligation et est un pilier fondateur de l’Islam. A ce propos, le Prophète a dit : « Quiconque rompt le jeûne sans raison valable telle que la maladie ne pourra se racheter dût-il jeûner pour le restant de sa vie. » (Sunan-Ad-Daarimi, Bab Aftara Yawman Min Ramadan). Ce constat établi, venons-en aux multiples exceptions précisées par le Coran lui-même, qui interdit le jeûne aux voyageurs, aux personnes vulnérables ainsi qu’aux personnes atteintes de maladies.
Désormais, il faut se souvenir qu’il s’agit bien là d’une interdiction coranique et que quiconque jeûne sous ces conditions commet en réalité une atteinte à ce que Dieu nous donne comme facilité pendant le mois de Ramadan. Concernant le voyage, d’aucuns n’hésiteront à affirmer que les voyages sont devenus bien plus faciles désormais et que pour les petites distances, il est possible de jeûner, comme lorsqu’on prend un train climatisé et confortable. Rappelons-nous ici de plusieurs éléments de contexte. D’abord, à la Mecque, lorsque ce verset a été révélé, il existait déjà des voyageurs qui parcouraient de petites distances et d’autres qui parcouraient de plus longues. Pourtant, Dieu n’a pas fait de distingo, rendant ainsi Son interdiction générale et impersonnelle. Ensuite, même pour les bédouins, il existait plusieurs types de voyage : le voyage sur la chamelle étant plus confortable que celui à cheval, par exemple. Dieu aurait pu, ici aussi, avoir pris soin de faire la distinction mais Il ne l’a pas fait.
En conséquence, il faut arrêter d’inventer des exceptions là où une interdiction générale a été mise en place. Comme il existe plusieurs mères de famille qui décident, bien qu’enceintes, de pratiquer le jeûne au motif que cela n’a aucun effet sur le fœtus. Gardons à l’esprit que lorsque Dieu donne une facilité, il n’est pas nécessaire de se compliquer inutilement la vie pour forcer Son plaisir. Car au fond, le jeûne n’est pas fait pour la société dans laquelle nous vivons ou pour plaire à tout un chacun, en soutenant pendant les différents ftours que cela fait 10, 11 ou 12 Ramadan que je fais, malgré le fait d’être enceinte. Il n’y a rien d’héroïque dans une telle attitude, davantage une inconscience du danger qu’un fœtus peut encourir, notamment pour des jeûnes de plus de seize heures. Le jeûne est bien fait pour Dieu qui ne regarde que les intentions. Plutôt que de jeûner formellement, intensifions nos prières et, là, il y a un accomplissement du jeûne.
Aussi souvenons-nous : le but ultime demeure l’obéissance, pas l’inverse !
* Asif Arif est avocat au Barreau de Paris, auteur spécialisé sur les questions d’Islam et de laïcité. Retrouvez ici sa page Facebook.