« Le PAM n’aura pas d’autre option que de suspendre les distributions alimentaires dans les régions contrôlées par Ansarullah » si l’aide ne parvient pas aux bénéficiaires, écrit le directeur général de l’organisation David Beasley dans cette lettre remise début mai et dont l’authenticité a été confirmée lundi à l’AFP.
Ansarullah est le nom du mouvement des rebelles Houthis qui contrôlent le Nord et une grande partie de l’Ouest du pays, dont la capitale Sanaa.
L’ONU peine à faire appliquer un accord entre les belligérants yéménites négocié en Suède sous son égide en décembre. Les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran, sont opposés aux forces progouvernementales, appuyées par une coalition militaire menée par l’Arabie saoudite depuis 2015.
« Ces dernières semaines, les progrès ont stagné », affirme M. Beasley, ajoutant que de nouvelles revendications des Houthis pourraient menacer les accords signés.
Dans ce texte adressé au haut responsable rebelle Mahdi al-Mashat, le directeur général du PAM signale avoir déjà exprimé « très clairement sa vive préoccupation » concernant le détournement de l’aide alimentaire en décembre 2018, date à laquelle une première lettre avait été adressée aux Houthis.
Après avoir noté quelques progrès à la suite de ce premier texte, l’organisation a évoqué une stagnation, voire une régression, selon le porte-parole du PAM, Hervé Verhoosel.
La lettre est authentique et « a été remise en mains propres aux dirigeants Houthis au Yémenpar le directeur adjoint du PAM, Amir Abdulla, début mai », a-t-il ajouté.
Les rebelles Houthis n’ont pas commenté dans l’immédiat ces informations.
L’organisation onusienne, dont le siège est à Rome, a renchéri dans l’après-midi, déplorant « l’obstruction et la non-coopération » de certains leaders Houthis.
« Nous affrontons quotidiennement des défis en raison des combats incessants et de l’insécurité au Yémen. Et pourtant, notre plus grand défi ne vient pas des fusils, qui doivent encore se taire dans ce conflit, mais de l’obstruction et de la non-coopération de certains leaders Houthis dans les zones qu’ils contrôlent », a accusé le PAM dans un communiqué.
« Les travailleurs humanitaires se voient interdit l’accès à ceux qui ont faim, les convois d’aide sont bloqués, les autorités locales interfèrent dans la distribution de la nourriture et, le plus important, des obstacles ont systématiquement été mis à notre sélection indépendante des bénéficiaires » de l’aide de l’agence, ajoute le PAM.
Le conflit au Yémen a tué des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux civils, selon diverses organisations humanitaires.
Environ 3,3 millions de personnes sont toujours déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d’assistance, selon l’ONU.
Une mission du PAM a eu accès le 5 mai à des entrepôts de blé près de la ville occidentale de Hodeida (ouest). L’organisation onusienne y a signalé des tirs le 9 mai qui n’ont pas fait de victimes.
Le port de Hodeida est crucial pour les importations et l’arrivée de l’aide humanitaire internationale au Yémen, dont certaines régions sont au bord de la famine.