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Non, le gouvernement ne va pas faire diversion en « tapant » sur les musulmans

Après les déclarations de Bruno Le Maire, la gauche estime que le gouvernement français fait une tentative de « diversion » islamophobe. C’est mal connaître l’état de l’islamophobie en France.

Il a promis « 100 jours d’apaisement ». Le président Emmanuel Macron tente de faire passer sa réforme des retraites. Sauf que les premiers jours censés être ceux de l’apaisement n’ont pas vraiment changé quoi que ce soit : la lutte continue et les Français vont, semble-t-il, continuer à sortir dans la rue.

Une sortie d’un des membres du gouvernement a provoqué une drôle de réaction. Mardi, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, que l’on attendait forcément un peu plus sur le sujet des retraites, a esquivé une question d’une journaliste de BFMTV pour affirmer que les Français en avaient « ras le bol de la fraude » et qu’« ils n’ont aucune envie de voir que les personnes peuvent bénéficier d’aides, les renvoyer au Maghreb ou ailleurs, alors qu’il n’y ont pas le droit. Ce n’est pas fait pour ça, le modèle social ».

Mélenchon dénonce une diversion

Face à cette sortie de Bruno Le Maire, la gauche s’est émue. Tout le monde, de LFI aux partis penchant plus vers le centre-gauche, y ont vu une tentative de « diversion » de la part du gouvernement. Autrement dit, pour chercher l’apaisement, les ministres de Macron auraient décidé de « taper » sur les Arabes et, au travers de cela, sur les musulmans.

Jean-Luc Mélenchon s’est adonné à ce qu’il sait le mieux faire : lancer une polémique en s’incluant dans le sérail des Français d’origine maghrébine. « Chers compatriotes musulmans ou originaires, comme moi, du Maghreb, préparez-vous. Pour faire diversion, le gouvernement annonce par la voix de Bruno Le Maire une nouvelle campagne pour vous montrer du doigt », a-t-il écrit.

Même son de cloches du côté des socialistes. « Mobiliser des préjugés racistes pour éviter de rappeler que la fraude sociale est essentiellement le fait des employeurs et la fraude fiscale est sans commune mesure. L’extrême-droite remplit dangereusement le vide gouvernemental », a affirmé Faure, le premier secrétaire du PS. Alors que son compère Boris Vallaud indiquait : « Jour 1 des 100 jours d’apaisement: flatter les préjugés xénophobes ».

Les oppressés méprisés

Il est vrai que l’on s’attendait à des saillies contre les cibles préférées du gouvernement. Notamment depuis lundi, lorsque le président Macron avait promis de « renforcer le contrôle de l’immigration illégale », alors que le débat actuel porte essentiellement sur les retraites.

Mais estimer que l’islamophobie ou le racisme sont de simples « diversions », c’est mal connaître la situation que vivent les citoyens français d’origine maghrébine, les musulmans du pays et les étrangers.

Lors d’un discours qui date d’il y a deux ans, le PIR rappelait que « la lutte contre l’islamophobie n’est pas nouvelle ; elle est aussi longue que la présence des musulmans en France, même si elle n’a pas toujours pris des formes identifiables et conventionnelles ». Et le mouvement anticolonial de rappeler : « L’un des enseignements que nous tirons de nos années de lutte contre l’islamophobie, c’est qu’elle n’est pas une diversion qui ferait des musulmans des bouc-émissaires ou des épouvantails jetés à l’opinion publique. Comprendre cela, c’est comprendre les ressorts de l’islamophobie, et pouvoir mieux la combattre. Si l’État français vise les musulmans et les musulmanes, leur restreint leurs libertés, les humilie, les intimide, les contrôle, les surveille, les réprime, et cela à tous les âges et dans tous les espaces de vie, c’est qu’ils constituent une menace subversive et une puissance révolutionnaire ».

L’islamophobie d’État omniprésente

En résumé l’islamophobie ne peut être considérée comme une simple diversion. Ce serait atténuer l’oppression contre les musulmans. Pour le journal marxiste Révolution, « la stigmatisation des musulmans est, plus que jamais, l’arme de diversion massive dont se servent les mêmes politiciens dans un contexte économique et social catastrophique ». Et « ce n’est pas nouveau », poursuit le journal qui rappelle que, en 1905, Lénine écrivait : « La bourgeoisie réactionnaire a partout eu soin d’attiser les haines religieuses (…) pour attirer de ce côté l’attention des masses et les détourner des problèmes économiques et politiques réellement fondamentaux ».

On peut certes comprendre cette méthode. Mais c’est oublier un peu vite que, même quand les problèmes économiques et politiques sont minimes, le Maghrébin et le musulman restent toujours les bouc-émissaires.

Pour rappel, le « Rapport Islamophobie en Europe » indiquait, en 2020, que, en France, « une violence d’État brutale a été légitimée au nom des lois antiterroristes ». Le rapport déplorait également « à quel point l’islamophobie d’État s’est développée ».

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